Quand les artistes dessinaient les cartes (exposition aux Archives nationales)

Vues et figures de l'espace français, Moyen Âge et Renaissance



1) Une exposition aux Archives Nationales (25 septembre 2019 - 7 janvier 2020)

Archives nationales site de Paris - Hôtel Soubise
http://www.archives-nationales.culture.gouv.fr/quand-les-artistes-dessinaient-les-cartes

Survoler ou parcourir les villes et campagnes de France du Moyen Âge et de la Renaissance ? Découvrir une autre cartographie, aux confins du relevé, de l'observation et de l'art ? C'est à cela qu'invite l'exposition Quand les artistes dessinaient les cartes. Vues et figures de l'espace français, Moyen Âge et Renaissance.


Ces « figures » (comme on les appelait à l'époque) sont spectaculaires : manuscrites, peintes sur du parchemin, parfois de très grand format (certaines font plus de 5 mètres de long), elles sont finement dessinées, joliment colorées, abondamment annotées, indéniablement pittoresques. Elles sont aussi très variées. De fait, la plupart ont été faites par des artistes, parfois parmi les plus renommés de leur époque : Léonard de Vinci, Bernard Palissy, Jean Cousin… Précédant la mise au point des normes et outils cartographiques « modernes », les auteurs ont usé de procédés originaux pour restituer l'espace : relevé empirique et observation du terrain depuis un point élevé (clocher, éminence), représentation des lieux en plan ou en perspective, par vue panoramique, aérienne ou plongeante. Elles se trouvent ainsi au confluent de l'art et de la cartographie dont l'évolution, à la même période, vers la construction mathématique et le support imprimé sera aussi évoquée.

Assez curieusement, aucune de ces cartes n'était faite pour montrer le chemin d'un lieu à un autre ou pour guider le voyageur. Faites à la demande de commanditaires prestigieux (rois, princes, abbayes, villes), elles étaient liées à des pratiques de gouvernement. Elles délimitaient une frontière ou des droits, aidaient à trancher des procès, illustraient des travaux d'aménagement, appuyaient des opérations militaires, décrivaient des événements historiques, cataloguaient des possessions ou célébraient l'identité d'un lieu ou d'un territoire. Ces usages expliquent le souci d'exactitude et de véracité du dessin, mais aussi parfois certaines déformations ou occultations de la réalité.

A l'heure du GPS, de Google View et Google Earth, qui remettent d'actualité l'ambition d'embrasser par le regard un large espace à l'aide d'une image le reproduisant, ces cartes « au vrai » ne laissent pas de nous surprendre et de nous faire réfléchir sur notre rapport à l'espace et sa retranscription. A travers cette exposition, les Archives nationales ont pour ambition de porter à la connaissance de tous ces documents méconnus, et dont la plupart seront exposés pour la première fois au public.
Accompagnement pédagogique
Vernissage pédagogique en présence de Juliette Dumasy, commissaire de l'exposition.
Mercredi 25 septembre  de 14h30 à 16h30. Ouvert aux enseignants de tous niveaux et de toutes les disciplines.
Inscription auprès du service éducatif

Visite-atelier - L'île des mers perdues De la carte rêvée à la carte scientifique
Après la visite de l'exposition, il est proposé aux élèves de réaliser une carte. Au choix : soit une carte imaginaire , soit une carte scientifique en utilisant les procédés cartographiques et géographiques du XVIIIe siècle.
Pour une meilleure circulation dans l'exposition, les classes sont systématiquement dédoublées.
Durée : 2h

Visite virtuelle de l'exposition


2) La presse en parle

"Expo : quand la cartographie du Moyen-Âge réglait les querelles de clocher" (Télérama)


Quand les artistes dessinaient les cartes (Le cours de l'histoire, France Culture)
Peut-on considérer une carte comme une oeuvre d'art ? Dans quelle mesure l’étude de la cartographie sous l’angle artistique remet également en question certains principes de l’histoire de la cartographie ?

Le journal The Guardian revient sur cette combinaison magique entre l'art et la science à travers un article : The perfect combination of art and science : mourning the end of paper maps (The Guardian).






3) Quelques cartes remarquables
Ce dessin appartenant à une histoire généalogique des rois de France est la première carte connue représentant la France indépendamment de l'Europe. La carte montre une France bien différente du fameux hexagone orienté vers le nord : au XVe siècle la France est décrite comme un losange ou comme un carré. Quatre rivières vertes définissent le royaume : de gauche à droite, la Meuse, a Seine, la Loire et la Gironde. En bas est figurée la Manche dénommée ici mer d'Angleterre. En haut se trouve la Saône à gauche, prolongée par le Rhône à droite. Il n'y a aucune mention de la mer Méditerranée (voir la carte de France à la mort de Charles VII en 1461).


Léonard Dauphant en donne une lecture dans un article publié dans L'Histoire (Comment on imaginait la France au Moyen Age, n°460, juin 2019). Même si très peu avaient accès aux cartes, les hommes et les femmes du Moyen Age savaient se représenter leur territoire.
http://factuel.univ-lorraine.fr/sites/factuel.univ-lorraine.fr/files/files/2019/u63/histoire.pdf

"Cette carte de France, qui est plutôt un schéma mental dessiné, a été découverte par la médiéviste américaine Camille Serchuk dans une chronique conservée à la BNF, A tous nobles, écrite en 1461. La France est une surface, peut-être un losange, semée de villes et orientée avec l’ouest en bas. .. Si on veut lire cette image comme un espace quadrillé et homogène (c’est-à-dire comme une carte moderne), on est forcé de conclure à une mauvaise maîtrise géographique. En fait, le peintre a associé plusieurs listes de lieux dans les deux dimensions du parchemin."

Découverte par Gaël Lebreto, la carte de Castelferrus est un document juridique commandité à un peintre, afin de régler un litige entre le village de Castelferrus et celui Saint-Aignan. Le litige concerne l'autorisation d'enterrer ou non les morts à Castelferrus et de délaisser l’église et le cimetière de Saint-Aignan. Avec près de deux mètres de long sur un de large, la carte de Castelferrus n’est pas un document de travail, c’est une fresque. Le concept de vue figurée comme pièce de procès reprend les principes de la preuve par le témoignage des anciens : elle se fixe pour objectif de fournir un point de vue clair et être reconnu de tous.

 



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