Atlas de la désertification en Espagne


Source : Martínez-Valderrama, J., Olcina Cantos, J., Guirado, E., Martí-Talavera, J., Cintas, J. (eds.) (2025). Atlas de la desertificación de España. Publicaciones de la Universidad de Alicante.

Le premier Atlas de la désertification en Espagne a été réalisé par des spécialistes de l'Université d'Alicante et du Conseil supérieur de la recherche scientifique. Selon cet Atlas, 206 217 km² sont touchés par la désertification. Cela représente 40,9 % du territoire espagnol. Ce pourcentage est le double de la dernière estimation officielle de désertification. Cela s'explique par le fait que le nouvel atlas prend en compte non seulement l'état des sols, mais aussi les ressources en eau. Par conséquent, une zone qui semble en bon état peut être considérée comme dégradée en raison de la détérioration des eaux souterraines.

Un projet financé par l'Union européenne

Le projet « Atlas de la désertification en Espagne » (ATLAS) a été soumis à l'appel à projets de la Fondation pour la biodiversité du ministère de la Transition écologique et du Défi démographique (MITECO), afin de soutenir des programmes et des projets de recherche sur la gestion de la biodiversité, dans le cadre du Plan de relance, de transformation et de résilience NextGenerationEU pour l'année 2022, financé par l'Union européenne.

L’objectif général de ce projet est d’élaborer un Atlas de la désertification en Espagne pour sevir de base aux actions à mener dans le cadre de la Stratégie nationale de lutte contre la désertification et à la mise en œuvre de la neutralité en matière de dégradation des terres en Espagne. Cet objectif principal se décline en plusieurs objectifs spécifiques :

  • Rassembler, sous différentes catégories (par exemple, climat, utilisation des terres, eau, démographie, etc.) de cartes à l'échelle nationale, des variables liées à la désertification (par exemple, pour la catégorie « eau », l'utilisation des ressources en eau, l'état des nappes phréatiques, la teneur en nitrates des aquifères, etc.).
  • Établir un inventaire des cas de désertification en Espagne en se basant sur ces informations, ainsi que sur les paysages de désertification du Programme d'action national contre la désertification et les scénarios de désertification de la Stratégie nationale de lutte contre la désertification.
  • Élaborer une carte des probabilités de désertification en utilisant des techniques d'intelligence artificielle (IA), le « Big Data » et l'inventaire mentionné ci-dessus.
  • Fournir un accès libre à toutes les informations cartographiques relatives à la désertification produites dans le cadre de ce projet.

Le besoin de disposer de cartes sur la désertification

La désertification est l'un des principaux problèmes environnementaux de l'Espagne. Sa gravité et son étendue ne cessent de croître – parallèlement à l'expansion des zones arides – en raison du changement climatique, de l'exploitation non durable des ressources naturelles et de l'absence de mesures efficaces pour s'attaquer à ses causes. L'ambiguïté du concept de désertification a conduit à la disparition des cartes de désertification du dernier Atlas mondial de la désertification. Or, il est essentiel de savoir quelles zones sont désertifiées, lesquelles sont en voie de désertification et lesquelles risquent de le devenir.

La désertification est définie par la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification comme la « dégradation des zones arides, semi-arides et subhumides sèches en raison des variations climatiques et des activités humaines », la dégradation étant comprise comme « la perte de productivité biologique, économique et de biodiversité ».

Cartographier la désertification et évaluer son ampleur représente un défi constant depuis la publication de la première carte mondiale en 1977. Depuis, six cartes mondiales de la désertification (dont deux atlas) et quatre autres cartes sur la dégradation des terres – prenant en compte les zones arides et humides – ont été réalisées. Après plus de quarante ans d'efforts, le dernier Atlas mondial de la désertification ne couvre toujours pas l'ensemble des processus de désertification.

Les obstacles, jusqu'ici difficiles à surmonter, sont les suivants :

  1. Concentrer les différents processus de désertification en un seul indicateur en additionnant diverses grandeurs sans aucune base statistique (par exemple, additionner l'érosion et la dégradation des aquifères).
  2. Ces estimations reposent principalement sur des évaluations subjectives d'experts ; il serait donc difficile de les appliquer ailleurs ou par d'autres observateurs, et de les considérer comme une condition de référence pour évaluer les changements futurs.
  3. Bon nombre des grandeurs mesurées à l'échelle locale sont très difficiles à estimer à plus grande échelle.
  4. Déterminer quantitativement le seuil qui sépare l'état non dégradé de l'état dégradé.

L’absence de cartes de désertification offre l’opportunité d’établir une méthodologie de cartographie de la désertification, non seulement en Espagne, mais aussi à l’échelle mondiale. Des initiatives telles que la neutralité en matière de dégradation des terres et le besoin de ces informations dans les régions potentiellement touchées par la désertification (environ 46 % de la surface terrestre) justifient l’investissement de ressources et de temps dans cette tâche.

« Cartographier ce processus complexe et les différentes variables impliquées est la première étape vers l'élaboration de solutions efficaces », affirment les chercheurs. Paradoxalement, la difficulté à conceptualiser ce phénomène rend sa cartographie particulièrement ardue. De fait, le dernier Atlas mondial de la désertification, datant de 2008, ne comportait pas de cartes en raison de difficultés méthodologiques. Dans ce cas précis, le recours à l'intelligence artificielle et aux algorithmes a permis d'identifier des signes de dégradation sur chaque pixel du territoire national.

Grâce à la mise en œuvre d'un modèle Random Forest et à partir d'une collection de preuves de dégradation et d'une série de variables prédictives, a été élaborée une carte de la probabilité de dégradation des terres en Espagne. La carte de l'Atlas actuel, même imparfaite et sujette à débat, doit offrir une référence utile permettant de combler en partie le vide cartographique existant sur cette question.

Carte de probabilité de la dégradation (source : Atlas de la desertificación de España)

Contenu de l'Atlas

L'Atlas se compose de trois sections distinctes. La première rassemble toutes les informations cartographiques relatives à la désertification. Ces informations sont classées en différentes rubriques ou catégories (toujours imparfaites). Les auteurs commencent par les conditions climatiques, qui déterminent l'aridité et donc le contexte dans lequel les processus de désertification peuvent se produire. Ensuite, ils abordent les relations entre la désertification et l'eau, le sol, l'agriculture et les incendies.

La deuxième partie, qui constitue le cœur du projet, présente les cartes de désertification. Avec les cartes précédentes, elle vise à rassembler toutes les informations cartographiques relatives à la désertification. Enfin, une série d'études de cas est présentée afin d'éclairer la nature du problème. Bien que les cartes soient accompagnées de descriptions et d'interprétations, il est important, compte tenu de la complexité et de l'ambiguïté de ce phénomène, d'expliquer les différentes nuances de la désertification. Avec l'aide de divers experts, ces cas sont analysés de manière spécifique.

Répartition de la population par catégorie d'aridité (source : Atlas de la desertificación de España)

Murcie, Albacete, Almería, Las Palmas, Valladolid et Alicante sont les provinces les plus touchées par ce phénomène qui entraîne la disparition totale des sols utilisables pour l'écologie et l'agriculture. L'ADE (Agence andalouse pour le développement durable) désigne clairement l'agriculture comme principale consommatrice d'eau et facteur déterminant de la dégradation des sols. La superficie irriguée a déjà atteint 3,78 millions d'hectares, l'Andalousie étant en tête de la croissance de ce système agricole depuis le début du siècle. Des cultures en principe non irriguées comme les oliviers, les vignes et les amandiers sont également irriguées. Entre 2018 et 2024, 483 624 tonnes de fruits et légumes ont été jetées, la production excédant la demande et les prix du marché ne permettant pas de couvrir les coûts. Par ailleurs, l'atlas met en évidence l'abandon rapide des zones rurales, la population se concentrant dans des zones urbaines presque toujours situées en régions arides. Quatre Espagnols sur cinq vivent dans des zones densément peuplées, ce qui accroît la pression sur les ressources naturelles. La gestion des ressources en eau et la transformation du territoire exigent de nouvelles solutions. Celles-ci incluent la réutilisation intégrale des eaux usées, associée à des usines de dessalement et à des transferts d'eau, ainsi que la maîtrise de la frénésie immobilière grâce à une analyse approfondie des zones de construction et de leur impact sur la consommation d'eau. « Lutter contre la désertification, à l’instar d’autres crises environnementales contemporaines, exige en définitive une transformation des valeurs et une compréhension plus approfondie des socio-écosystèmes dans lesquels nous vivons », conclut l’ADE.

Télécharger l'Atlas de la désertification en Espagne. Accès aux cartes de l'Atlas.

Découvrir et télécharger l'Atlas mondial de la désertification.

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