Quand l'Administration Trump fait disparaître des données sur les sites gouvernementaux


L'Administration Trump a fait retirer des données sur le réchauffement climatique et différents sujets jugés sensibles (diversité, équité, inclusion) sur les sites gouvernementaux des Etats-Unis. En réaction, des chercheurs, des militants ou de simples citoyens s'organisent pour dénoncer cette censure et garantir un accès à ces données.

1) De nombreux sites gouvernementaux censurés par l'Administration Trump

Un des premiers sites concernés par ces mesures de « mise  à jour »  (censure) de données semble être celui du CDC (Center for Disease Control and Prevention), très impliqué dans la diffusion de données publiques au moment de la crise Covid et critiqué par les anti-vax. La suppression de ces directives crée une lacune majeure dans les informations scientifiques et met des patients en danger en ce qui concerne la prévention des infections et l’utilisation appropriée des antibiotiques, argue la Society for Healthcare Epidemiology of America. Dans une déclaration commune, les responsables de l'Infectious Diseases Society of America et de l'HIV Medicine Association ont déclaré que la suppression des ressources liées au VIH et aux LGBTQ du site Web du CDC « est profondément préoccupante et crée une lacune dangereuse dans les informations et les données scientifiques permettant de surveiller et de répondre aux épidémies de maladies » (Cidrap). La disparition des données inquiète particulièrement la Dre Rasmussen, qui est virologue. Par exemple, les données sur la propagation de la grippe aviaire aux États-Unis sont particulièrement importantes en ce moment pour le monde entier (Radio-Canada).


Cela concerne aussi certaines pages du ministère américain de l'Éducation (DEI), notamment celles consacrées au genre et aux discriminations raciales (Yahoo News). L'administration Trump a lancé un ultimatum : cesser d'utiliser les « préférences raciales » comme facteurs d'admission, sinon les écoles qui le font risquent de perdre de l'argent. Trump a même évoqué une possible suppression du ministère de l'Éducation (The Guardian). L'Université d'Hawaï a d'ores et déjà supprimé sa rubrique « diversité » dans le but de préserver un financement fédéral. Ces mesures sont liées à un décret de Trump, selon lequel il n'existe que deux genres (hommes et femmes) et qui impose aux agences de « supprimer toutes les déclarations, réglementations, communications ou autres messages » sur « l'idéologie du genre »

La page « Erreur 404 » s'affiche sur de plus en plus de sites officiels des États-Unis. On retrouve des pages vidées de leur contenu sur les sites du département d’Etat, de la défense, des transports ou de l’agriculture. Les données se sont pour ainsi dire évaporées. Sur le site de l’Agence de protection de l’environnement (EPA), la partie sur le changement climatique n’est plus accessible sur la page d’accueil, ni dans les onglets sur les « sujets environnementaux ».


Il arrive même que des sites complets soient désactivés. Le site web de l'Agence américaine pour le développement international (USAID) a été mis hors ligne, alors que le gel de l'aide étrangère par Trump s'intensifie, suscitant des craintes que l'USAID perde son indépendance et soit absorbée par le département d'État (Le Monde). Par ailleurs, Trump a ordonné au ministère américain de l’Agriculture (USDA) de supprimer les sites Web faisant référence à la crise climatique (The Guardian).

L'Administration Trump a également licencié Colleen Shogan, l'Archiviste des États-Unis. Avant de devenir « Archivist of the United States », Colleen Shogan était vice présidente de la White House Historical Association (ArchiMag). Son « tort » ? Avoir accompli son devoir en exigeant que l’administration Trump transmette l’ensemble des documents et traces numériques de son premier mandat, y compris les messages échangés sur WhatsApp. Cette démarche, conforme aux principes fondamentaux de la démocratie américaine, avait notamment permis de révéler le scandale des documents classifiés retrouvés dans la résidence personnelle du Président à Mar-a-Lago (Le Soir).

La National Science Foundation (NSF), qui finance des recherches dans le monde entier, fait face à des licenciements potentiellement massifs et à des coupes budgétaires. L'agence du FBI n'est pas non plus épargnée par les licenciements. Emporté par sa vague de purge, le Département de l’efficacité gouvernementale (DOGE) dirigé par Elon Musk a été jusqu'à licencier 300 personnes de la National Nuclear Security Administration, sans se rendre compte qu'une partie d'entre elles avaient en charge la gestion du stock d'armes nucléaires des États-Unis (CNN).

« Nous entrons dans un âge d’or de l’ignorance », prévient le professeur à l’université Stanford (Californie), tandis que la climatologue Valérie Masson-Delmotte, ex-coprésidente du groupe 1 du GIEC, y voit de l’« obscurantisme ». « Pour cette administration, les faits scientifiques sont dangereux, il faut les faire taire », observe-t-elle. Et de peser ses mots : « C’est l’héritage des Lumières qui est menacé. C’est sans précédent dans un pays démocratique, en dehors de périodes fascistes » (Le Monde). « Imaginez un immense autodafé numérique, où ce ne sont plus des livres qu’on brûle, mais des sites web, des pages Internet, des index, des bases de données » (Radio France).

Dans un livre publié en 2007, La Stratégie du choc (Actes Sud), l’essayiste et militante canadienne Naomi Klein montre que cette méthode, consistant à « intervenir immédiatement pour imposer des changements rapides et irréversibles à la société éprouvée par le désastre », a été théorisée depuis longtemps aux États-Unis. Les économistes néolibéraux préconisaient des thérapies de choc. Les cadres des services de renseignement et les militaires appliquaient des méthodes de torture par électrochocs afin de rendre les suspects amnésiques et parfaitement manipulables. Les libertés étaient rognées au nom de la lutte contre le terrorisme. « Les partisans de la stratégie du choc, affirme Naomi Klein, croient fermement que seule une fracture radicale – une inondation, une guerre, un attentat terroriste – peut produire le genre de vastes pages blanches dont ils rêvent. C’est pendant les moments de grande malléabilité – ceux où nous sommes psychologiquement sans amarres et physiquement déplacés – que ces artistes du réel retroussent leurs manches et entreprennent de refaire le monde » (Philosophie Magazine).

Les récentes déclarations outrancières de Donald Trump concernant Gaza, le Canada ou le Mexique font partie d’une stratégie de communication bien ficelée. Théorisée par l’ancien président américain Richard Nixon, la « madman theory » (théorie du fou, en français) joue sur l’imprévisibilité et la folie de son utilisateur pour s’assurer un avantage dans les rapports de force (Ouest-France).

2) La riposte pour continuer à assurer un accès à ces données

La bibliothèque de la faculté de droit de Harvard collecte des documents gouvernementaux et les met à la disposition de ses usagers depuis des siècles, et poursuit ce travail. Le Harvard Law School Library Innovation Lab a créé un coffre-fort de données permettant de télécharger, de signer comme authentiques et de mettre à disposition des copies des données gouvernementales publiques les plus utiles aux chercheurs, aux universitaires, à la société civile et au grand public dans tous les domaines. Ils ont commencé à collecter des parties importantes des ensembles de données suivis par Data.gov, les référentiels fédéraux Github et PubMed. Une source coopérative a été mise en place pour archiver les données de Data.gov. La collecte des données avait commencé avant le début du 2e mandat de Trump. Elle atteint 311 000 jeux de données récoltés entre 2024 et 2025. Les archives Internet disposent également d'un utilitaire la Wayback Machine, qui permet de parcourir et de capturer immédiatement les pages Web afin qu'elles soient intégrées sur Internet Archive (une mémoire du web qui est elle-même menacée)


Les scientifiques réagissent en proposant des sites miroirs. C'est le cas par exemple pour les données environnementales de l'EPA qui dispose d'un groupe appelé « Environmental Justice Screening and Mapping ». L'application EJScreen est très utile pour mettre en évidence les zones de recensement défavorisées et marginalisés à partir de différents indicateurs socio-environnementaux. Ce visualiseur n'étant plus accessible, une version 2 a été déposée sur GitHub. Elle peut être directement consultée à partir d'un site miroir.

EJScreen. Environmental Justice Screening and Mapping Tool (Version 2.3)



« Des décennies de recherche ont montré que les communautés défavorisées se situent à l’intersection de niveaux élevés d’exposition aux risques et de pauvreté. Les outils géospatiaux de justice environnementale (JE), tels que l’outil de dépistage de la justice climatique et économique (CEJST) développé par le Conseil de la Maison-Blanche sur la qualité de l’environnement, sont conçus pour intégrer différents types de données sanitaires, sociales, environnementales et économiques afin d’identifier les communautés défavorisées et d’aider aux décisions politiques et d’investissement qui s’attaquent aux problèmes omniprésents, persistants et largement non résolus associés aux disparités environnementales aux États-Unis » (Constructing Valid Geospatial Tools for Environmental Justice, 2024).

On peut également retrouver des ensembles de données et des outils archivés sur le climat et la justice environnementale sur le site web des Public Environmental Data Partners. D’autres groupes archivent les données du portail américain Data.gov et les rendent accessibles ailleurs. Certains chercheurs mettent également en ligne des jeux de données dans des dépôts publics consultables comme OSF, géré par le Center for Open Science. « Si vous craignez que certaines données encore disponibles ne disparaissent, consultez cette checklist des bibliothèques du MIT. Elle indique les étapes à suivre pour contribuer à la sauvegarde des données fédérales. Ce qui n’est pas clair, c’est de savoir jusqu’où l’administration Trump ira pour supprimer, bloquer ou dissimuler les données et la science du climat, et surtout dans quelle mesure elle y parviendra. Le juge d’un tribunal fédéral a d’ores et déjà estimé que la suppression par les Centers for Disease Control and Prevention de ressources de santé publique sur lesquelles s’appuient les médecins était préjudiciable et arbitraire. Ces ressources ont été remises en ligne grâce à cette décision » (The Conversation).

Les informations sur Internet semblent être là pour toujours, mais elles ne sont permanentes que dans la mesure où certaines personnes choisissent de les rendre permanentes. Lorsque les ressources internet sont modifiées ou mises hors ligne, la méfiance s’installe à l’égard du gouvernement et de la science.  (The Conversation). Le maintien de l'accès aux données officielles constitue un enjeu majeur. Il n'est pas d'étude scientifique possible sans disposer de jeux de données complets. Ces suppressions de pages, parfois remises en ligne après avoir été expurgées de certains éléments, inquiètent de nombreux scientifiques. Passé le choc de la sidération, il s'organisent progressivement pour organiser la riposte. 

Sources

« Les sites Web fédéraux américains suppriment les données sur les vaccins et les références LGBT » (BBC).

« Trump instaure son ministère de la vérité…». Le limogeage de Colleen Shogan, directrice des Archives nationales américaines, par Donald Trump ne relève pas d’un simple caprice. Il s’inscrit dans une dérive plus profonde, où le contrôle de l’histoire devient un outil de pouvoir, faisant écho au monde dystopique de «1984» de George Orwell (Le Soir).

« États-Unis. L’USAID pourrait passer de 10 000 à 290 employés ». Selon le New York Times, le gouvernement de Donald Trump veut réduire les effectifs de l’Agence des États-Unis pour le développement international à moins de 300 personnes, contre plus de 10 000 actuellement (Courrier international).

« Mon patron pleurait. La NSF fait face à des licenciements potentiellement massifs et à des coupes budgétaires ». Trump pourrait proposer de réduire le budget de l'agence de deux tiers (Science.org)

« Pourquoi les sociétés de prévision météorologique privées ne peuvent pas remplacer le service météorologique national ». La NOAA et le NWS fournissent des données météorologiques publiques que les entreprises privées ne peuvent pas recréer (American Scientific)

« États-Unis : des preuves de l'assaut du Capitole ont disparu d'un site officiel du gouvernement  » (BFM-TV).

« Comment l’administration Trump censure les femmes et les minorités à l’université » (Mediapart).

« DOGE a un accès en mode Dieu  aux données gouvernementales ». La commission spéciale du président dispose désormais d’une capacité sans précédent de consulter et de manipuler les informations de nombreuses agences fédérales (The Atlantic).

« Connaissez-vous la "théorie du fou", utilisée par Trump pour instaurer un rapport de force ? » (Ouest-France).

« Contre la purge sans précédent des sites ordonnée par Trump, les archivistes du numérique à l’offensive ». Des décrets signés par le nouveau président des Etats-Unis ont entraîné la disparition de milliers de pages, liées notamment au changement climatique ou aux politiques d’égalité. Plusieurs initiatives coordonnées cherchent à les préserver (Le Monde). 

« Sauver les données scientifiques de la purge numérique de l’administration Trump ». Peu après l’assermentation de Donald Trump, des milliers de pages web du gouvernement fédéral américain ont disparu. Heureusement, des chercheurs canadiens et américains avaient déjà archivé numériquement une bonne partie de ces sites (Radio-Canada).

« Alors que l'administration Trump supprime les données en ligne, les scientifiques et les bibliothécaires numériques se précipitent pour les sauvegarder » (Salon.com).

« Comment retrouver les informations climatiques effacées par l’administration Trump » (The Conversation).

« La bibliothèque de droit de Harvard agit pour préserver les données gouvernementales dans un contexte de purges massives  ». Les universitaires et chercheurs de domaines tels que la santé publique, les études climatiques et la sociologie se sont retrouvés dans une situation difficile. Le New York Times a rapporté avoir découvert que plus de 8 000 pages Web gouvernementales avaient été supprimées à la suite de la transition présidentielle. L'Innovation Lab a réussi jusqu'à présent réussi à préserver 311 000 ensembles de données copiés entre 2024 et 2025, soit 16 téraoctets de données (Reuters).

« La résistance universitaire au trumpisme. Entretien avec Joan W. Scott » (Mouvements). L’historienne Joan W. Scott est professeure émérite à l’Institute for Advanced Study de Princeton, New Jersey. Mondialement célèbre pour avoir introduit l’idée d’une perspective de genre en histoire, autrice de travaux importants sur les usages politiques de la laïcité en France, elle est également une spécialiste reconnue de la question des libertés académiques. Quelques jours après la deuxième élection de Donald Trump en novembre 2024, Joan Scott a publié un article dans le Chronicle of Higher Education, une revue très lue par les universitaires aux Etats-Unis, intitulé “We will have to resist”, "Nous allons devoir résister".

« Résister à Trump avec un manuel de sabotage des années 1940, un étonnant retour  ». L’ouvrage gratuit qui caracole en tête des téléchargements actuellement est le “Simple Sabotage Field Manual”, écrit en 1944 par l'ancêtre de la CIA. Un succès qui n’étonne pas les historiens des services de renseignements à l'heure où une certaine résistance s'organise face aux premières actions de Donald Trump et d'Elon Musk. (France 24).

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La carte, objet éminemment politique : quand Trump arrange à sa façon la trajectoire prévue du cyclone Dorian

Démesures d'Abya Yala. Dé-cartographier - recartographier l'Amérique latine


Le symposium en ligne "Démesures d'Abya Yala. Dé-cartographier - recartographier l'Amérique latine", se tiendra les 12, 13 et 14 mars de 14h à 18h30 (heure de Paris). Il réunira des chercheur·ses ainsi que des membres de collectifs militants et associatifs, qui discuteront différentes formes de cartographies alternatives en Amérique latine, de l'époque coloniale à nos jours. Les présentations seront en espagnol et portugais, avec une traduction simultanée en français.

Le site web du projet est accessible à l'adresse suivante desmensuras.com. Pour assister au colloque en traduction simultanée française, il convient de s’inscrire sur le site.



  • Mercredi 12 mars. Cartographier plus que le territoire
14h - Introduction par Pierre Gautreau (Collectif Desmensuras, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne)

14h15 - 17h – Présentations
- Contre-cartographie de l'espace anarchiste de Santiago du Chili
Pedro Palma Calorio (Universidad de Chile, ONG Observatorio CITé et Núcleo de Estudios de Geografía Anarquista) ; Gricel Labbé Céspedes (ONG Observatorio CITé, Universidad Católica Silva Henríquez) ; Ignacio Ayala Cordero (Centro Cultural Museo y Memoria de Neltume) ; Ignacio Arce Abarca (ONG Observatorio CITé) ; Francisco Peña Castillo (Universidad de Santiago de Chile) ; Roberto Salas (Uni. Alberto Hurtado).
- Se souvenir du passé pour dessiner le territoire dans le Chaco argentin
Alberto Preci (Sorbonne Université - Laboratoire Médiations, France).
- Les tumulus autochtones como îles de mémoire : Contre-cartographies pour la construction d’une histoire décoloniale (Uruguay)
Colmenarez Sabrina ; Gianotti Camila ; Febrero Valentina, Marín Suárez Carlos, Gazzán Nicólas ; Cancela - Cereijo Cristina et Sotelo Moira (Universidad de la República - CURE).
- Cartographies des pratiques de soins communautaires dans les quartiers suds de Mar del
Plata (Argentine)
Valeria Alonso (Instituto Nacional de Epidemiología - Universidad Nacional de Mar del Plata) ; Mariano Olivera (Universidad de Buenos Aires) ; María Inés Benítez, María Graciela Zigalini (Asociación Vecinal de Fomento Playa Serena, Mar del Plata).
- Du cheveu au fil : tresses et tissages comme langages cartographiques de résistance
Diana María de los Angeles Vicente Munarriz (Universidad Nacional Mayor de San Marcos, Pérou) et Brayan Stiven Bueno Herrera (Universidad de Antioquia, Colombie).
- Se souvenir des cartes pour converser (Argentine et France)
Juan Manuel Diez Tetamanti (Conicet, Argentine).

17h30 - 18h30 - Table ronde : pourquoi un Atlas des « Démesures » ?
Participant.e.s : intervenant.e.s de la journée, membres du collectif Desmensuras, Manuel Bayón
Jiménez (Colegio de México et Karlsruhe Institute of Technology).
  • Jeudi 13 mars. Cartographier en contextes contestés et/ou controversés
14h - 17h – Présentations
- Les cartographes guarani et la cartographie missionnaire (Paraguay – XVIIIe siècle)
Junia Ferreira Furtado, (Universidade Federal de Minas Gerais) ; Artur H. F. Barcelos (Universidade Federal do Rio Grande, Brésil).
- Missionnaires et/ou anthropologues ? Les transformations de la mission jésuite au Mato Grosso (1952-1990)
Pierre-Louis Choquet (IRD - Laboratoire PRODIG, France).
- Carte du territoire kichwa du Bajo Huallaga
Anke Kaulard, Maritza Paredes, Danitza Gil, Paula Tafur, Kevin Malca, Akemi Higa (Pontificia Universidad Católica del Perú).
- L'archipel latino-américain : entre la mer de la dévastation et les îles des corps intenses.
Jorge William (Groupe Clacso, Frontières, régionalisation et mondialisation. Projet Dysfunctional Chaos - Colombie).
- Cartographie de la présence mapuche-lavkenche dans la région métropolitaine de Concepción (Chili).
Diego Benavente, Mauro Fontana, Matthew Caulkins (Universidad de Concepción, Chili).
- Une pratique cartographique pour visibiliser les logiques d'expansion territoriale du capital
et leurs effets sur les biens communs (Mexique).
Collectif Geocomunes (Mexique).

17h30 - 18h30 - Table ronde : L'(im)possible décolonisation de la cartographie ?
Participant.e.s : intervenant.e.s de la journée + Henri Acselrad (Université fédérale de Rio de Janeiro).
  • Vendredi 14 mars. Cartographie et formation de collectifs
14h - 17h – Présentations
- Nova cartografia Social : production de connaissances et mobilisation (Brésil)
Franklin Plessmann de Carvalho, Mirna Silva Oliveira, Jaziel dos Santos Silva, Genival Pereira Araújo Moura, Jakeline Honoria de Souza, Edvando Jesus Vieira (Universidade Federal do Recôncavo da Bahia. Núcleo de Estudos em Agroecologia Nova Cartografia Social, Brésil).
- Tisser des réseaux pan-autochtones : monitoring autochtone et communautaire en Amérique centrale
Yann Voisin (Université Sorbonne Nouvelle, Laboratoire CREDA, France).
- Le projet Tô No Mapa (Brésil)
Isabel Castro, André Oliveira (IPAM) et Sirlene Barbosa.
- Cartographies périphériques : itinéraires pour déchiffrer les changements et les tensions à l’articulation entre urbain et rural dans le sud de la ville de Bogotá.
Manuel Enrique Pérez Martínez (Pontificia Universidad Javeriana, Colombie).
- Carte mondiale des terres des peuples autochtones et des communautés locales : le projet
Landmark
Fabrice Dubertet (Université de Bordeaux - Laboratoire PASSAGES, France).
- Las Colonias visibles - La cartographie communautaire comme pratique de l’autonomie
Judith Neidhardt, Marian Dörk, (Université des sciences appliquées, Potsdam) ; Miodrag Kuč (Centre pour l'art et l'urbanisme, Berlin)

17h30 - 18h30 - Table ronde : Le contrôle social des données cartographiques partagées
Participant.e.s : intervenant.e.s de la journée + Ana Parraguez
  • Samedi 15 mars. Cartographies et imaginaires
14h - 17h – Présentations
- La Guía del Mundo (Le Guide du Monde) – la contre-encyclopédie tiers-mondiste des années
1970
Roberto Bissio (Institut du tiers monde, Uruguay).
- Les « supprimés » de la carte : Bacurau (film, Brésil)
Eve Anne Bühler (Universidade Federal do Rio de Janeiro, Brésil).
- Les "Cartes Astrales : plurivers d’un espace-temps en spirale", exercices de cartographie spéculative
Pablo Mansilla (Pontificia Universidad Católica de Valparaíso, Chili)
- L'Amérique centrale en mouvement
Mir Rodríguez Lombardo et Gabriela Fenner Sánchez (Colectiva Cartográfica de los Sures Globales, Panamá).
- Ineffaçables
Fidel Mingorance (Geoactivismo, Association HREV.org, Colombie).

17h30 - 18h30 - Table ronde : Cartographies et art(s)
Participant.e.s : intervenant.e.s de la journée, Paula Serafini (University of London) Carla Lois (Conicet-Universidad de Buenos Aires)

Recueil de propositions
Dans cette section, vous trouverez les propositions que nous avons reçues à ce jour. Certains ont été sélectionnés pour le Symposium de mars (voir le programme ici), mais nous en recevons encore d'autres pour la publication de l'Atlas, jusqu'en juillet 2025.

Ce colloque fait partie d’un projet à plus long terme d’Atlas des cartographies non conventionnelles de l’Amérique latine, pour lequel nous continuons à recevoir des propositions de contributions. Pour soumettre des propositions, cliquez ici.


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Où les Parisiens sont-ils nés ? (Insee Analyses)


Source :  « Où les Parisiens sont-ils nés ? » (Insee Analyses Ile-de-France, 19 février 2025)

Plus des deux tiers des Parisiens sont nés hors de la capitale. Près de 30 % sont originaires de province, en particulier du sud du bassin parisien ou de l’ouest de la France, mais aussi des Antilles. Un quart des Parisiens sont nés à l’étranger. Le choix de la capitale, plutôt que d’autres territoires français, est prégnant pour les natifs des États-Unis et de certains pays d’Asie ou d’Afrique. Enfin, un Parisien sur sept est né dans un autre département d’Île-de-France. Selon leur lieu de naissance, les Parisiens ont des profils différents en matière d’âge, d’activité professionnelle, de catégorie sociale ou de conditions de logement. Cela fait de la population de Paris une mosaïque sociale qui évolue depuis 50 ans au gré des migrations : désormais, elle comprend relativement moins de natifs de Paris ou de province et plus de natifs de l’étranger.

Sommaire



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Comparer l'image aérienne de l'Île-de-France en 1949 avec celle d'aujourd'hui (Institut Paris Région)

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Carte imaginaire du royaume de Poyais : quand la carte fait le territoire


Le royaume de Poyais, entre le Nicaragua et le Honduras, n’a jamais existé. Et pourtant, on en garde une carte datée de 1830 qui le décrit en détail. Celle-ci porte le nom de « carte de la Neustrie », du nom de la Compagnie de la Nouvelle Neustrie chargée de trouver des investisseurs et des colons pour son projet de colonisation de l'Amérique centrale. La carte est consultable en haute résolution sur le site Gallica. Retour sur l'une des plus grandes escroqueries cartographiques du XIXe siècle.

Carte de la Neustrie par Desmadryl jeune, 1830 (source : Gallica)

Le Poyais est un État fictif d'Amérique centrale imaginé par le mercenaire écossais Gregor MacGregor. L'aventurier Gregor MacGregor vécut en Amérique de 1812 à 1821. Il y participa aux guerres d'indépendance hispano-américaines en combattant notamment pour le Venezuela et la Nouvelle-Grenade. À son retour au Royaume-Uni en 1821, il affirma que le Roi de la Mosquitia George Frédéric Augustus Ier l'avait nommé cacique du Poyais, un territoire bordant le golfe du Honduras présenté comme une colonie développée avec une communauté de colons britanniques. Environ 250 colons vont se rendre vers le pays fictif. Ils ne trouveront que de la jungle, plus de la moitié d'entre eux trouvera la mort. Connu pour avoir mis en place de nombreuses escroqueries dans sa vie, MacGregor crée de toutes pièces le territoire du Poyais, sur lequel il prétend régner comme cacique, afin d'y attirer des investisseurs et colons français et britanniques. La supercherie, considérée comme l'une des fraudes les plus audacieuses de l'Histoire, dure seize ans de 1821 à 1837 (Wikipedia).

Dans son article, Atlas Obscura fait état des nombreux éléments utilisés par l’escroc pour crédibiliser son histoire. La carte a joué un rôle central : Gregor MacGregor a représenté un territoire imaginaire de manière extrêmement détaillée. Le document inclut des villes fictives comme St. Joseph, Lempira, et même une ville nommée MacGregor, en son honneur. Des précautions qui ont donné l’impression de villes et de routes clairement définies. L’ancien mercenaire savait que les cartes étaient perçues comme des documents légitimes qui faisaient foi. En proposant une cartographie détaillée, il renforçait l’idée que Poyais était un endroit réel, qu’il n’y avait plus qu’à le trouver. Cette représentation géographique lui a permis de manipuler la perception de ses victimes (Géo).

Il faut dire que la carte donne beaucoup de détails qui paraissent vraissemblables, tels des "etablissemens anglais abandonnés en 1786", une "hotellerie des voyageurs" ainsi que de nombreux noms de rivières, criques, baies, lacs, montagnes et autres éléments topographiques. Comportant une échelle exprimée en plusieurs unités et sourcée à partir de différentes autres cartes, elle est recommandée "chez tous les marchands de cartes et tous les principaux libraires de l'Europe". La carte présente ainsi tous les signes extérieurs d'une carte authentique. On y relève des détails mentionnant la découverte d'un eldorado, ainsi "la Neustria ou Grande Rivière du Cap, appelée aussi Rivière ou Fleuve d'Or". On en trouve une édition légèrement différente où l'imprimeur Desmadryl jeune est indiqué comme géographe, avec une seule échelle exprimée en lieues françaises assortie du commentaire "Pour la position géographique, voyez une bonne carte des Antilles ou du Golfe du Mexique en Amérique centrale" (sic). La carte est déposée "chez Picquet, géographe du Roi", ce qui lui donne un caractère encore plus officiel. Bien que datée également de 1830, cette 2e édition semble plus tardive, indiquant des mines d'or et le début du tracé d'un "Canal des deux Mers" (Europeana).

Pour l'un des établissements prévus dénommé Refugium, on dispose d'un plan remarquable projetant l'implantation humaine et l'exploitation future de cette colonie ("Description de la Moskitie où se fonde la Neustrie"). Le plan géométrique indique avec précision l'organisation spatiale de la colonie avec ses plantations, ses avenues rectilignes, ses places disposées régulièrement. Les noms des places valent en soi tout un programme : place des Fondateurs, place de l'Indépendance, place de l'Agriculture, place de l'Éducation avec, en plein centre du plan, la place Bolivar pour rappeler que MacGregor a combattu aux côtés du héros libérateurOn y retrouve le nom de négociants ayant investi dans la colonie tels Jacques Laffitte ou Joseph Merilhou. Les plantations portent des noms tout aussi idylliques : plantation Elizée, plantation Edorado, plantation Les Délices, plantation Sans souci, ou plus réaliste plantation Descorvées. 

Neustrie. Plan du refugium (source : Wikipedia, disponible aussi sur Gallica)

La Compagnie de la Nouvelle-Neustrie était une petite société coloniale parisienne dirigée par Jean-François Lehuby, négociant, mandataire-général et administrateur de ladite société. Celui-ci a fait l'objet d'un procès en 1826 le condamnant, avec trois de ses associés, à 13 mois de détention pour escroquerie. MacGregor a, quant à lui, été jugé innocent. Ce dernier finira par abandonner son projet de colonie en Moskitie et décédera en 1845 à Caracas où « il repose au Panthéon national du Venezuela, bien que – ironie du sort – aucune plaque n’y atteste de sa présence » (Clavel, 2018).

Restée à l'état de territoire imaginaire, la Nouvelle Neustrie était censée être implantée dans une région assez hostile. La région correspond géographiquement à la Côte des Mosquitos, une région située sur le littoral est du Nicaragua et nord-est du Honduras. Elle comptait au XVIIe siècle parmi les repaires de corsaires, pirates et flibustiers, huguenots ou puritains. Sa partie hondurienne est une région de forêt humide, fortement sous-développée, avec peu de routes. Divers indiens Mosquitos y habitent, tels les Pechs et les Tawahkas. La région de la Côte des Mosquitos fut, à partir de 1661, le siège d'un royaume indigène, connu parfois sous le nom de royaume de Mosquitie. Celui-ci se plaça dès 1668 sous le protectorat de l'Angleterre, puis la Grande-Bretagne, qui ne s'exerça toutefois que de manière relativement informelle et intermittente jusqu'au milieu du XIXe siècle. La région passe ensuite sous le contrôle de la Nouvelle-Espagne. En 1821, la région est intégrée au Mexique. En 1823, à la chute de l'Empire mexicain, la région prend son indépendance avec comme capitale Bluefields, bien que le dernier roi miskito fut couronné à Belize.

La Côte des Mosquitos (1848). Par Great Britain. Foreign Office, domaine public (source : Wikimedia)


En 2015, l'artiste australien Cameron Hayes s’amuse à esquisser une carte fictive et uchronique de Poyais, représentant le monde au sein duquel le faussaire d’art Elmyr de Hory aurait parfaitement pu s’épanouir en 1969. « Sans fondement historique d’aucune sorte, cette réappropriation dudit territoire de MacGregor ne sert qu’à incarner allégoriquement les excès de l’avarice humaine et de la duperie financière » (Clavel, 2022).

Références

« Le pays imaginaire de Poyais : l'histoire de la plus grande arnaque géographique du XIXe siècle » (Géo)

 « This Map Shows a Fictional Country Created by a Con Man » (Atlas Obscura)

Clavel, Damian (2018). Fraude financière, dette souveraine et impérialisme d’affaires Une micro-histoire de l’échec de Poyais 1820-1824. Thèse présentée à l’Institut de Hautes Etudes Internationales et du Développement  pour l’obtention du grade de  Docteur en histoire internationale, sous la direction de Philippe Burrin, Genève (Institut de hautes études internationales et du développement)

Clavel, Damian  (2022). Créer un pays, le royaume de Poyais. Gregor MacGregor, emprunts d’État et fraude financière 1820-1824, éditions Alphil (livre en pdf gratuit). Ce livre propose une déconstruction et une réécriture de l’histoire de Poyais. En retraçant minutieusement la genèse, le développement, et la chute du projet de Poyais à l’aune des multiples traces laissées par MacGregor, l’idée d’émettre un emprunt d'État sur le marché des capitaux londonien dans les années 1820 apparaît moins comme une fraude financière monumentale que comme une tentative ratée de financer l’établissement d’une colonie privée et de soutenir la création d’un nouveau pays en Amérique centrale.

Hayes, Cameron (2015).  Elmyr de Hory, Fernand Legros and Real Lessard in the Republic of Poyais in 1969, huile sur toile de lin (NSW Art Gallery).

Catalina Toro-Pérez. La Mosquitia, protectorat anglais dans les colonies indépendantes. Lieu stratégique et forme de contrôle de la nature et des corps (Atlas Caraïbe). L'histoire coloniale et républicaine divise l'Amérique Centrale en deux parties, un Nord et un Sud, la première moitié étant dominée par l'Espagne et la seconde par les Anglais. Même après l'indépendance des Provinces Unies d'Amérique Centrale avec à la tête des Espagnols, les Anglais continueront d'exercer leur contrôle sur la Mosquitia jusqu'en 1860 et sur le territoire d'origine Maya actuellement contesté par le Guatemala (actuel Belize). Le contrôle "indirect" mis en place par la Grande-Bretagne dans les colonies d'Asie et d'Afrique sera également exercé sur la côte Caraïbe du Nicaragua et du Honduras et une zone intérieure faite d'écosystèmes de forêts humides, de savanes, de marécages et d'eaux navigables. Cette zone n'a pas été peuplée par des habitants hispanophones, pendant la colonisation espagnole et a conservé une influence anglophone. 

Articles connexes









La mondialisation appréhendée à travers un indice de connectivité mondiale


Source : Steven A. Altman & Caroline R. Bastian, DHL Global Connectedness Report 2024 : An In-Depth Analysis of the State of Globalization.

Récemment, une attention particulière a été portée à la question de savoir si la mondialisation progressait ou reculait à l’échelle mondiale. La plupart des entreprises et des pays interagissent entre eux et non avec le monde entier. C’est pourquoi il est important de pouvoir mesurer la mondialisation en ce qui concerne chaque pays et ses principaux partenaires dans les échanges internationaux.

L’indice de connectivité mondiale DHL classe les pays en fonction de leurs échanges internationaux, de leurs capitaux, de leurs informations et de leurs flux de personnes. Il évalue ces flux selon deux dimensions : la profondeur (taille des flux internationaux par rapport à l’activité nationale) et l’ampleur (répartition des flux entre les pays d’origine et pays de destination). La connectivité mondiale reste à un niveau record, malgré les tensions et les incertitudes géopolitiques.

Flux globaux par région en 2022 (source : DHL Global Connectedness Report 2024)

L'étude conduite par la Stern School of Business de l’université de New York et la société de transport DHL fait ressortir 10 points clés concernant la mondialisation qui n'a jamais été aussi forte en dépit des tensions et incertitudes :

  1. La connectivité mondiale a atteint un niveau record en 2022. Elle est restée proche de ce niveau en 2023. La résilience et la croissance des flux internationaux d’échanges commerciaux, de capitaux, d’informations et de personnes face aux crises récentes vont à l'encontre de l’idée selon laquelle la mondialisation auarait fait marche arrière. 

  2. Singapour est le pays le plus connecté au monde, suivi des Pays-Bas et de l’Irlande. Singapour a les flux internationaux les plus importants par rapport à l’activité nationale, tandis que les flux du Royaume-Uni sont les plus répartis dans le monde.

  3. Les liens entre les États-Unis et la Chine continuent de diminuer. Les parts des flux des deux pays impliquant l’autre ont diminué d’environ un quart depuis 2016. Le recul des échanges directs entre les États-Unis et la Chine s’est accéléré en 2023. Mais les États-Unis et la Chine sont toujours connectés par des flux plus importants que presque toutes les autres pays.

  4. La Russie et l’Europe se sont découplées, rompant des liens autrefois considérés comme essentiels pour les deux partenaires. Les échanges commerciaux de la Russie se sont éloignés des pays alignés sur l’Occident et les investissements étrangers en Russie se sont effondrés. Parmi les principales économies du G20, la Russie a connu en 2022 la plus forte baisse annuelle de connectivité mondiale jamais enregistrée.

  5. Les flux mondiaux ne montrent aucune division générale de l’économie mondiale entre les blocs géopolitiques rivaux. La part des échanges entre les blocs alignés sur les États-Unis et ceux alignés sur la Chine a augmenté pendant la pandémie de Covid-19, puis a diminué après l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie. Si l’on exclut la Russie, elle est désormais revenue à peu près à son niveau d’avant la pandémie.

  6. La mondialisation des entreprises continue de progresser. Les entreprises réalisent une plus grande partie de leurs ventes à l’étranger et la valeur de leurs projets d’expansion internationale annoncés est à son plus haut niveau par rapport au PIB mondial depuis plus d’une décennie. La part transfrontalière des fusions et acquisitions reste stable, tout comme la part de la production mondiale que les entreprises produisent en dehors de leur pays d’origine.

  7. La mondialisation n’a pas cédé la place à la régionalisation. La plupart des flux internationaux se déroulent sur des distances assez longues, avec une part en baisse au sein des principales régions géographiques. Si l’on se concentre spécifiquement sur le commerce, seule l’Amérique du Nord affiche une tendance claire à la délocalisation.

  8. La mondialisation des flux d’informations a augmenté plus que tous les autres aspects de la mondialisation au cours des deux dernières décennies, mais les dernières données montrent que cette tendance stagne.

  9. Les tensions entre les États-Unis et la Chine ont pesé sur la collaboration internationale en matière de recherche, et de nombreux pays ont imposé des restrictions sur les flux internationaux de données.

  10. Le niveau absolu de mondialisation du monde reste limité : les flux nationaux dépassent toujours de loin les flux internationaux. La profondeur actuelle de la connectivité mondiale n’est que de 25 % sur une échelle allant de 0 % (aucun flux ne traverse les frontières nationales) à 100 % (les frontières et la distance n’ont plus aucune importance).
Données et graphiques consultables à travers un tableau de bord interactif

Rapport et annexes à télécharger en pdf


Outre les données récentes, l'intérêt de cette étude est de fournir des cartes par anamorphoses montrant chaque pays avec ses 10 principaux partenaires commerciaux. Avec le retour de Trump et de sa politique douanière, l'orientation de ces flux pourrait être en partie modifiée dans les années qui viennent. Le modèle de Bloomberg Economics sur les droits de douane proposés par Trump prévoit que les autres pays compenseront la majeure partie de leurs pertes commerciales avec les États-Unis en échangeant davantage entre eux. Cela laisse entrevoir la possibilité que la mondialisation continue à s'intensifier, mais sans les États-Unis en son centre (What's left of Globalization without the US ? Bloomberg)

Comparaison Etats-Unis et Chine (source : DHL Global Connectedness Report 2024)




Comparaison France et Royaume-Uni (source : DHL Global Connectedness Report 2024)



Pour compléter

« La mondialisation n’a jamais été aussi forte qu’en 2024 » (Le Grand Continent)

« Mondialisation : vers un capitalisme anti-libéral » (France Culture)

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Cartographie des pays ayant les États-Unis ou la Chine comme principal partenaire commercial (2001-2023)

Carte de l'influence mondiale de la Chine et des États-Unis

Mesurer le rayonnement des grandes puissances à travers leurs réseaux diplomatiques

Cartographie collaborative des dispositifs d'indésirabilité


Source : Milan Bonté (17 janvier 2025). « Une cartographie collaborative du mobilier urbain hostile ». Du béton et des plumes. Carnet de recherche sur le genre, les territoires et les minoritéshttps://doi.org/10.58079/133tc

A l’université de Lille, les étudiant-es de M2 Urbanisme et Aménagement disposent, début janvier, d’une semaine de formation en outils (SIG, croquis, dessin d’architecture, etc.) dans la perspective de leur très prochaine entrée dans le monde professionnel. Milan Bonté était chargé du module intitulé “Outils numériques au service des approches participatives“, dans lequel il avait pour mission d’initier un petit groupe d’étudiant-es aux outils cartographiques numériques qui peuvent être mobilisés lors de démarches de participation citoyenne. Il a saisi l’occasion d’inscrire ce module dans un vaste projet de recherche portant sur la “fabrique urbaine de l’indésirabilité” dans les espaces publics, financé par la défenseure des droits et coordonné par Muriel Froment-Meurice et Claire Hancock.

Durant l’ensemble de la semaine, le petit groupe s’est affairé à la création d’une application qui permette au grand public de cartographier, dans la France entière, les dispositifs qui contraignent les usages de l’espace public et produisent de facto des usages et usagers indésirables. On connait, à ce propos, le mobilier anti-SDF, qui vise à empêcher les siestes par des bancs à accoudoirs centraux ou des ornements rendant impossible toute tentative de se réfugier sous un porche pour une nuit.

Une cartographie collaborative du mobilier urbain hostile (source : Du béton et des plumes)


Vous pouvez consulter la carte et contribuer directement ici :
https://dispositifs-indesirabilite.gogocarto.fr/map#/carte/@47.44,1.14,5z?cat=all

L’application finale comprend une page d’accueil, sur laquelle le projet est expliqué, une carte qui recense l’ensemble des contributions et un formulaire, qui permet à n’importe qui de proposer l’ajout d’un dispositif. Ainsi, si vous avez connaissance d’un élément de mobilier urbain hostile, vous pouvez le prendre en photo et l’ajouter à la carte en cliquant sur “Ajouter un élément”.

Cartographie collaborative des dispositifs d'indésirabilité
https://dispositifs-indesirabilite.gogocarto.fr/

L’espace public, lieu de sociabilité et de diversité, reflète également les tensions sociales et les inégalités structurelles. Sa gestion et son aménagement peuvent générer des effets différenciés sur les individus, certains rencontrant des obstacles à s’y sentir légitimes ou à l'aise, modelant ainsi les usages de l’espace public. Ces ressentis sont façonnés par une combinaison de facteurs, qu’ils soient liés aux caractéristiques physiques des lieux, aux dispositifs de sécurité, ou aux dynamiques sociales et normatives qui s’y déploient.

En mars 2023, la Défenseure des droits a lancé un appel à recherche sur la gestion de l’espace public et les stratégies d’éviction des populations dites "indésirables". Cet appel vise à étudier les mécanismes formels et informels – qu’ils relèvent des infrastructures, des politiques urbaines ou des interactions sociales – qui participent à l’exclusion de certains usagers des espaces publics.

Dans le cadre du projet de recherche "La fabrique urbaine de l’indésirabilité", le site propose une démarche participative pour recueillir les dynamiques d’exclusion dans l’espace public. Le grand public est invité à contribuer à une cartographie participative recensant les dispositifs que chacun perçoit comme excluants, manquants ou ayant disparus et pouvant évincer certains individus.

Pour en savoir plus

Milan Bonté, Associé – jeune docteur auprès de l’UMR Géographie-cités, explique dans cet article comment, dans le cadre d’un cours de géomatique de niveau avancé,  il a développé avec ses élèves une base de données collective portant sur le thème du mal logement dans la Métropole Européenne de Lille (MEL). https://geographie-cites.cnrs.fr/explorer-le-mal-logement-dans-la-metropole-europeenne-de-lille/

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Cartographie électorale et big data. Pourquoi les clivages politiques urbains-ruraux ne sont pas généralisables


Source : Noah Dasanaike (2025). Why Urban-Rural Political Cleavages Do Not (document de travail)

Les clivages entre zones urbaines et zones rurales sont considérés comme une division politique déterminante, principalement en Occident et aux Etats-Unis. Mais cette polarisation est-elle valable à l’échelle mondiale ? Noah Dasanaike étudie cette question en utilisant un ensemble de données originales de résultats électoraux granulaires et géocodés provenant de 106 pays (au niveau des bureaux de vote dans 70 pays). Dans cet ensemble de données qu'il appelle Small-Area Global Elections (SAGE), il teste des résultats standardisés correspondant à des limites spatiales artificielles ou réelles dans chaque démocratie et aux élections démocratiques précédentes de plusieurs autocraties actuelles. 

Les résultats des élections sont collectés et compilés sur une période de 3 ans. Il fusionne ces 10 milliards de votes avec 2,3 milliards d'empreintes de bâtiments pour mesurer l'urbanité, une approche qui permet de mieux appréhender la façon dont les gens perçoivent les zones urbaines et rurales. Il valide cela par rapport à la densité de population. Les résultats révèlent des variations considérables entre les pays. Dans de nombreux pays, les différences entre les zones urbaines et rurales sont faibles, voire inversées idéologiquement (zones rurales de gauche, zones urbaines de droite), et cela ne s'explique pas uniquement par le développement économique ou l'activité industrielle. Pour expliquer en partie ces résultats, l'auteur élabore une théorie dans laquelle les clivages urbains-ruraux proviennent du regroupement spatial d’attributs distincts des électeurs qui permettent aux partis de recourir à des votes géographiquement ciblés. D’abord à l’échelle mondiale, puis dans un test à grande échelle du comportement électoral à travers l’Europe, Dasanaike constate que la dispersion géographique des conditions économiques structurelles, à savoir l’agrarisme, l’industrialisation et l’agglomération des connaissances, explique en partie la disposition idéologique des villes vis-à-vis des campagnes.

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S'initier à la cartographie électorale à travers l'exemple des élections présidentielles de novembre 2020 aux Etats-Unis

Cartographie électorale, gerrymandering et fake-news aux Etats-Unis

Cartes et simulateur de votes de l'Observatoire électoral du Grand Continent

Bureaux de vote et adresses de leurs électeurs en France (Répertoire électoral unique - INSEE)

L'Insee propose un nouveau gradient de la ruralité (La France et ses territoires, édition 2021)

Cartographie des bassins urbains et ruraux à l'échelle mondiale (URCA - FAO)

Étude sur la diversité des ruralités (ANCT - Observatoire des territoires)

Quand les cartes révèlent les frontières fantômes


Cartographie critique de l'intelligence artificielle générative (collectif Estampa)

 

Le collectif Estampa propose une cartographie de l'intelligence artificielle générative. La carte met bien en évidence le parcours long et complexe des données lorsqu'on interroge une IA générative, avec tout ce que cela représente en termes de coût financier et de coût environnemental. Traduite en différentes langues (dont le français), la carte est téléchargeable en haute définition sur le site du projet Generative AI Mapping.

Cartographie de l'IA générative (source : Generative AI Mapping)


L’ensemble des relations présentées ici forme une mosaïque difficile à appréhender car elle implique la mise en relation d’objets et de connaissances de types et d’échelles différents. Les discours sur l’IA sont souvent mythiques et accompagnés d’une série de métaphores et d’images récurrentes : des agents algorithmiques déconnectés de l’action humaine, une technologie non négociable imposée par le futur, l’universalité des données ou la capacité de produire des modèles exempts de préjugés ou de visions du monde. L’ensemble des discours qui entourent ces technologies, qu’ils soient spécialisés ou plus populaires, finissent par les façonner d’une manière ou d’une autre. 

La carte, très détaillée, décrit les étapes sucessives de regroupement, filtrage, hébergement et distribution des données, avec à chaque étape les coûts induits que cela représente. Elle montre que l'IA repose dans ses fondements sur un modèle extraviviste de données (il faut beaucoup de données d'entraînement au départ), qu'elle nécessite de gros investissements de la part de start-ups capables de construire de gigantesques datacenters pour héberger les serveurs et fournir la puissance de calcul. Outre le coût financier, le côut environnemental est faramineux. Il faut des matériaux conducteurs (principalement de l'or), mais aussi du lithium pour les batteries, de l'eau pour refroidir les ordinateurs, ce qui se traduit par une forte pression sur les ressources. 

Le projet Generative AI Mapping est motivé par la volonté d'offrir une carte conceptuelle qui couvre une grande partie des acteurs et des ressources impliqués dans cet objet complexe et multiforme qu'est l'IA générative. À partir d’une longue série de cartographies critiques vouées à montrer la fonction des cartes comme productrices de vérités hégémoniques, cette visualisation vise à cartographier le phénomène en tenant compte des tensions, des controverses et des écosystèmes qui le rendent possible. Les outils d’IA générative sont utilisés pour automatiser des tâches telles que l’écriture ou la génération d’images. On peut dire d'une certaine façon que les outils d’IA générative désassemblent le langage (visuel, textuel) pour le réassembler sur la base d’un calcul de probabilité. Cette capacité de généralisation est due au traitement d'ensembles de données beaucoup plus grands et hétérogènes qui lui permettent de répondre à tous types d'instructions. En conséquence, l’ampleur du changement dans l’IA générative est si grande qu’elle nécessite l’impulsion de nouvelles économies et une dépendance accélérée à l’égard de différents écosystèmes. En ce sens, Generative AI Mapping se veut un projet de contre-cartographie visant à dénoncer le "colonialisme numérique", qui aboutit à la domination des pays en avance en matière d'IA par rapport aux autres pays et territoires de fait dominés.

Estampa est un collectif de programmeurs, cinéastes et chercheurs travaillant dans les domaines de l’audiovisuel et des environnements numériques. Leur pratique se base sur une approche critique et archéologique des technologies audiovisuelles, sur la recherche des outils et des idéologies de l’intelligence artificielle et sur les ressources de l’animation expérimentale. Ce travail a été soutenu par les subventions pour la recherche et l'innovation dans les arts visuels de la Generalitat de Catalunya - Oficina de Suport a la Iniciativa Cultural (OSIC).

Pour aller plus loin

Crawford, K. (2021). Atlas of AI: power, politics, and the planetary costs of artificial intelligence. New Haven, Yale University Press. 

« Que se passe-t-il lorsque l’intelligence artificielle sature la vie politique et épuise la planète ? Comment l’IA façonne-t-elle notre compréhension de nous-mêmes et de nos sociétés ? Dans ce livre, Kate Crawford révèle comment ce réseau planétaire alimente une évolution vers une gouvernance antidémocratique et une augmentation des inégalités. S’appuyant sur plus d’une décennie de recherche, de sciences et de technologies primées, Crawford révèle comment l’IA est une technologie d’extraction : de l’énergie et des minéraux nécessaires à la construction et à l’entretien de son infrastructure, aux travailleurs exploités derrière les services « automatisés », aux données que l’IA collecte auprès de nous. Plutôt que de se concentrer sur le code et les algorithmes, Crawford nous offre une perspective politique et matérielle sur ce qu’il faut pour créer une intelligence artificielle et sur les points sur lesquels elle se trompe. Si les systèmes techniques présentent un vernis d’objectivité, ils sont toujours des systèmes de pouvoir. Il s’agit d’un compte rendu urgent de ce qui est en jeu lorsque les entreprises technologiques utilisent l’intelligence artificielle pour remodeler le monde. »

Espinoza, M. I., Aronczyk, M. (2021). Big data for climate action or climate action for big data? Big Data & Society, 8(1). 

Sous la bannière « Data for Good », les entreprises des secteurs de la technologie, de la finance et de la vente au détail fournissent leurs propres ensembles de données aux agences de développement, aux ONG et aux organisations intergouvernementales pour les aider à résoudre toute une série de problèmes sociaux. l'ouvrage se concentre sur les activités et les implications de la campagne Data for Climate Action, un ensemble de collaborations public-privé qui exploitent les données des utilisateurs pour concevoir des réponses innovantes à la crise climatique mondiale. En s'appuyant sur des entretiens approfondis, des observations de première main lors d’événements « Data for Good », des rapports d’organisations intergouvernementales et internationales et sur la publicité médiatique, les auteurs évaluent la logique qui sous-tend les initiatives Data for Climate Action, en examinant les implications de l’application d’ensembles de données et d’expertises commerciales aux problèmes environnementaux. Malgré l’adoption croissante des paradigmes Data for Climate Action dans les efforts des gouvernements et du secteur public pour lutter contre le changement climatique, l'ouvrage montre que Data for Climate Action peut être considéré comme une stratégie visant à légitimer les pratiques d’extraction de données à but lucratif des entreprises plutôt que comme un moyen d’atteindre les objectifs mondiaux de durabilité environnementale.

«  Référentiel de compétences IA pour les apprenants et pour les enseignants » (UNESCO)

L’intelligence artificielle (IA) offre des potentialités pour relever nombre de défis majeurs dans l’éducation, innover dans les pratiques d’enseignement et d’apprentissage et accélérer les progrès de l’ODD 4. Cependant, les évolutions technologiques rapides engendrent inévitablement de multiples risques et défis, car leur rythme a jusqu’à présent dépassé celui des débats politiques et des cadres réglementaires. L’UNESCO s’engage à aider les États membres à exploiter les potentialités des technologies d’IA pour réaliser l’Agenda Éducation 2030, tout en veillant à ce que son application dans le domaine éducatif réponde aux principes fondamentaux d’inclusion et d’équité. Étant donné l’opacité de la « boîte noire » qui sous-tend les méthodes utilisées par les systèmes d’IA, les enseignants doivent comprendre à la fois comment l’IA est entraînée et comment elle fonctionne. Ils doivent également être en mesure d’examiner d’un oeil critique l’exactitude des contenus générés par l’IA et de concevoir des méthodes pédagogiques appropriées pour guider l’utilisation du contenu synthétisé par l’IA dans l’enseignement et l’apprentissage.

« L'intelligence artificielle, une arme géopolitique » (France Culture)

Duel États-Unis-Chine, à coup de milliards de dollars et de modèles de langage toujours plus révolutionnaires. Sommet à Paris coprésidé par l'Inde et annonces d'ambitions démesurées dans le monde entier. L'IA est devenue une arme géopolitique majeure. Voici les clés historiques de ce développement crucial dans une série audio de la rédaction de France Culture, en 6 volets.

« Les sacrifiés de l'IA » (France 2).

Magiques, autonomes, toutes puissantes : les intelligences artificielles nourrissent les rêves comme les cauchemars. Tandis que les géants de la tech promettent l'avènement d'une nouvelle humanité, la réalité de leur production reste totalement occultée. Pendant que les data centers bétonnent les paysages et assèchent les rivières, des millions de travailleurs à travers le monde préparent les milliards de données qui alimenteront les algorithmes voraces des Big Tech, au prix de leur santé mentale et émotionnelle. Seraient-ils les dommages collatéraux dommages collatéraux de l'idéologie du "long-termisme" qui couve dans la Silicon Valley depuis quelques années ?

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Une vidéo sur l'évolution du réseau Internet (1997-2021) à partir des données du projet Opte

Une cartographie mondiale des points de connexion Wi-Fi réalisée dans le cadre du projet WiGLE