Quels apports du Géoweb et de la géolocalisation pour représenter les mobilités touristiques ?


 Paris et son « Central Tourists District » (CTD)
(source : projet Locals and Tourists, 2010).


Une des questions qui intéresse particulièrement les géographes est de savoir comment appréhender les mobilités qui impliquent des variations importantes de populations présentes au même moment sur un territoire, qu’il s’agisse des résidents locaux ou des touristes qui y séjournent temporairement.

Nous présentons ici les cartes élaborées par Erica Fischer qui, depuis 2010, a progressivement mis au point une cartographie ingénieuse pour rendre compte de ces mobilités touristiques. Les points bleus sur la carte correspondent à des photos prises par les « locaux » : ainsi sont désignées les personnes qui ont pris des photos dans la ville pendant plus d’un mois. Les points rouges renvoient aux photos prises par des « touristes » (il conviendrait plutôt de parler de personnes extérieures à la ville) qui ont pris des photos pendant moins d’un mois. Les points jaunes sont des images où il n’est pas possible de déterminer si le photographe était ou non un « touriste », car il n’a pas pris d’autres photos.

Ces magnifiques cartes ont beaucoup circulé sur les réseaux sociaux, mais au-delà de leur esthétique, quel crédit peut-on leur accorder et quel sens peut-on leur donner ?

Lire la suite de l'article sur le site de la revue M@ppemonde.

Pour compléter l'article, voici l'exemple de Londres pour lequel nous reprenons les commentaires du site Brillants maps. D'autres villes ont donné lieu à des analyses intéressantes sur le site du Guardian. A compléter par cette carte animée qui géoréférence les images Flickr prises dans le monde entre 2007 et 2015.

 Les rues et quartiers touristiques à Londres (source : projet Locals and Tourists, 2010).


La carte montre que la ville de Londres est parcourue par de nombreux touristes et voyageurs d'affaires, du moins ceux qui tweetent, indiquant potentiellement des visiteurs plus jeunes et plus riches que dans d'autres villes. Le nord et l'ouest de Londres - ainsi que des sites centraux comme Trafalgar Square, Westminster, St James et Regent's Park - sont nettement plus rouges que l'est et le sud. A Londres, la plupart des touristes vont visiter le palais de Buckingham, les chambres du Parlement, la cathédrale Saint-Paul, Oxford Street, etc... Mais ils sont peu nombreux à visiter East Croydon, Hendon, Dagenham ou tout autre quartier périphérique. À l'inverse, les Londoniens peuvent passer des années sans jamais visiter les pièges à touristes du centre de Londres.

Les chercheurs Alexander Kachkaev et Jo Wood de l'Université de Londres ont géolocalisé plus d'1,5 million de lieux photographiés par 45 000 utilisateurs de Flickr sur la période 2008-2013. Leur analyse permet de distinguer les photos prises de jour ou de nuit, en extérieur ou en intérieur.

Les lieux de Londres les plus photographiés de jour ou de nuit (source : The Information Capital, 2014)



D'autres études ont été conduites à partir de données de connexion GPS sur téléphone portable. Luca Scherrer & alii. (2018) ont analysé les données de l’application de navigation mobile Sygic pour déterminer les comportements des locaux et des touristes en Australie (lire leur article Travelers and locals). A partir de l'exemple de Sydney et de Melbourne, les deux villes australiennes les plus peuplées, ils montrent que les « voyageurs » se rendent dans des zones distinctes pour un temps plus long, tandis que les « locaux » se déplacent sur des distances plus courtes et revisitent souvent les mêmes lieux. Etant donné que ces données de mobilité ne comportent pas d'informations précises sur les utilisateurs, il reste difficile d'établir si ces "voyageurs" sont effectivement des touristes.





En complément il est possible d'étudier la fréquentation touristique des monuments dans les grandes villes via les échanges sur Facebook. Sur leur téléphone mobile, les internautes sont incités à partager leur position et ce qu'ils font avec des amis. Au départ en 2010, Facebook envisageait de rentabiliser cette activité par des offres « d'enregistrement » permettant d'obtenir des réductions en fonction de la fréquence à laquelle un utilisateur visitait un magasin ou un restaurant. Mais ce projet a dû être abandonné, d'autres concurrents faisant déjà reposer leur modèle sur ce type de commentaires (comme Tripadvisor). Cette cartographie réalisée par Facebook dans un but promotionnel livre un classement des sites les plus "sociaux" à l'échelle mondiale et détaille la liste des 5 lieux les plus fréquentés pour 8 grandes villes (Berlin, Londres, New York, Melbourne, Paris, Sao Paulo, Séoul, Tokyo). L'analyse de ces cartes permet d'aborder la notion de "haut-lieu" touristique en géographie, tout en interrogeant la tendance des réseaux sociaux à cartographier et à orienter nos pratiques.

Principaux monuments partagés sur le réseau social Facebook (source : Column Five)



Les 5 principaux monuments partagés sur Facebook dans 8 grandes villes (source : Column Five)



Pistes d'analyse :
  • Classer chacune des 8 villes par types de lieux (monuments historiques, musées, stades et autres centres sportifs, salles de concert, centres d'activités commerciales, grands parcs...)
  • Les lieux culturels (monuments historiques, musées...) sont-ils encore les "haut-lieux" du tourisme aujourd'hui ?
  • Nuancer selon les villes
La même étude conduite en 2012 pour 25 villes mondiales fait apparaître pour les sites classés au premier rang :
    - Sept stades / grands centres sportifs
    -
Six espaces publics : places / avenues / parcs / jardins
   
- Deux parcs d'attraction
   
- Deux salles de concert
   - 
Deux lieux d'activités commerciales : shoppings centers / malls


Lien ajouté le 7 août 2020

Lien ajouté le 5 septembre 2020
Lien ajouté le 1er novembre 2021