Quelle évolution de la demande en eau d’ici 2050 ? (France Stratégie)


Source : « Quelle évolution de la demande en eau d’ici 2050 ? » (France Stratégie, rapport janvier 2025).

Dans un rapport publié le 20 janvier 2025, France Stratégie étudie plusieurs « trajectoires d’évolution » de la demande en eau. Les scénarios sont marqués par une « demande pour l’irrigation [qui] augmente fortement », l’agriculture se substituant au secteur énergétique comme « le premier préleveur avec environ un tiers des prélèvements ». Elle entraîne, dans presque toutes les configurations, une hausse des volumes consommés (c’est-à-dire non directement restitués au milieu) notamment pendant les mois les plus chauds, alimentant de futurs conflits d’usage.

Ce travail, commandé à l’automne 2023 par la Première ministre, étudie entre 2020 et 2050 les évolutions théoriques des prélèvements en eau et des consommations associées, c’est-à-dire la part des prélèvements évaporée, selon trois scénarios prospectifs. Le premier, appelé « tendanciel », prolonge les tendances passées. Le deuxième, baptisé « politiques publiques », simule la mise en place de politiques publiques récemment annoncées. Le troisième, dit « de rupture », se caractérise par un usage sobre de l’eau. Entre 2020 et 2050, dans la configuration climatique la plus défavorable étudiée, la demande annuelle stagne dans le scénario tendanciel (+ 1 %) et diminue dans les scénarios politiques publiques (- 24 %) et de rupture (- 47 %), notamment du fait de la baisse de la demande pour la production énergétique dans la vallée du Rhône. La demande pour l’irrigation augmente fortement et devient majoritaire. À la di érence de la production énergétique, l’irrigation consomme la majorité de l’eau prélevée en raison de l’évapotranspiration des plantes. Aussi les consommations augmentent-elles substantiellement dans les scénarios tendanciel (+ 102 %) et politiques publiques (+ 72 %). Dans ce dernier scénario, elles sont multipliées par plus de deux dans près d’un quart des bassins versants. Seul le scénario de rupture permet de contenir l’augmentation des consommations (+ 10 % par rapport à 2020) dans la configuration climatique la plus défavorable étudiée. Avec l’augmentation de la part de l’agriculture dans les prélèvements, la demande en eau sera davantage concentrée au cours des mois les plus chauds de l’année, quand la ressource en eau est au plus bas dans les milieux aquatiques. Une prochaine publication de France Stratégie quantifiera les tensions entre la ressource en eau disponible et cette demande.


Références

« Pour éviter de futurs conflits sur l’eau, il faudra moins en consommer, notamment dans l’agriculture, prédit France Stratégie » (Le Monde).

Pour compléter

« La carte de France de la dépendance en eau par EPCI » (CrATER)

Cette carte a été conçue dans le cadre du projet CrATER, qui est un outil d’aide au diagnostic de la résilience alimentaire pour les territoires de France métropolitaine. En France, pour la décennie 2010-2020, la consommation d’eau est répartie de la manière suivante : 58% pour l’agriculture, 26% pour l’eau potable, 12% pour l’énergie, 4% pour toutes les autres industries (INRAE). Mais 25 ans plus tôt, en 1995, la répartition était différente en France. Seulement 43% pour l'agriculture, 42% pour l'eau potable et 15% pour le reste. La part des prélèvements agricoles sur l'eau a donc augmenté de façon considérable en 30 ans.

Cette carte de France évalue la dépendance à la ressource eau pour l’irrigation, sur la base du croisement entre deux jeux de données : 1) Les indicateurs "Prélèvement en eau", c'est à dire le volume en m3 utilisé de 2012 à 2020 sur chaque EPCI - données de la Banque nationale des prélèvements quantitatifs en eau 2) La fréquence des "arrêtés sécheresse" sur les 5 dernières années. La moyenne de ces deux jeux de données donne cette carte très instructive, qui en dit long sur la vulnérabilité de certaines EPCI (voir le détail de la méthodologie). En 5 ans, les prélèvements pour l'irrigation agricole ont augmenté de 22%, alors que les arrêtés "sécheresse" ont été multipliée par 4. Résultat : La France est de plus en plus vulnérable au niveau de sa gestion des eaux superficielles.



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