Source : Guillerm M., Monso O., Évolution de la mixité sociale des collèges, Note d'Information, n° 22.26, DEPP, juillet 2022.
Les collèges ont des compositions sociales très différentes, ce qui est régulièrement décrit comme un facteur renforçant les inégalités scolaires. Le niveau et les composantes de la ségrégation varient d’un département à l’autre, compte tenu notamment du degré de ségrégation entre communes et quartiers, du poids du secteur privé et des inégalités économiques. Au niveau national, la ségrégation entre collèges est peu variable au cours du temps. La ségrégation parmi les collèges publics suit une tendance à la baisse et les écarts de composition sociale entre secteurs public et privé sont croissants, le secteur privé scolarisant de plus en plus d’élèves de milieu favorisé. Depuis 2014, la ségrégation a sensiblement diminué dans une vingtaine de départements situés majoritairement dans le Nord et l’Ouest. La ségrégation entre collèges publics y a baissé, et les écarts entre secteurs public et privé n’y ont pas augmenté. Inversement, dans une vingtaine de départements situés plutôt dans la moitié sud, la ségrégation a augmenté, avec une hausse marquée des écarts entre secteurs public et privé.
En 2015, une politique pour favoriser la mixité sociale au collège a été lancée par le ministère chargé de l’Éducation nationale. À l’échelle locale, les décideurs ont été incités à mettre en oeuvre des mesures favorisant la mixité au collège. L’objet de cette Note d’Information n’est pas d’évaluer ces actions, mais de proposer un état des lieux de la ségrégation sociale au collège à la rentrée 2021, en actualisant l’état des lieux que la DEPP a réalisé à la rentrée 2015 et de rendre compte de l’hétérogénéité entre départements en matière de niveau et d’évolution de la ségrégation sociale au collège. En effet l’évolution de la ségrégation sociale des collèges n’est pas seulement liée aux politiques éducatives, mais intègre aussi par exemple celles du logement ainsi que les conséquences des mobilités géographiques des familles.
1) Un indice d'entroprie pour mesurer la ségrégation sociale
Les indices de ségrégation visent à mesurer de façon synthétique les disparités entre les collèges. Ils permettent la comparaison des disparités entre collèges d’un territoire à l’autre, et au cours du temps. Les écarts de milieu social entre collèges sont ici mesurés par un indicateur de ségrégation, l’indice d’entropie. Cet indicateur varie entre 0 et 1. Quand il est élevé (proche de 1), cela signifie que les écarts sociaux entre collèges sont très importants et qu’au sein de chaque collège, la diversité des milieux sociaux représentés est plutôt faible ; quand l’indicateur est bas (proche de 0), cela indique que les écarts sociaux entre collèges sont moins importants et que la composition sociale de chaque collège est proche de la composition sociale de l’ensemble des collégiens du territoire considéré. On dira alors qu’il y a une plus grande mixité sociale entre les collèges.
2) Des disparités géographiques dans la ségrégation
La ségrégation est plus forte dans les départements les plus urbains. En métropole, l’indice de ségrégation atteint ses valeurs maximales dans les Hauts-de-Seine, à Paris et dans les Bouches-du-Rhône. En effet, les trois composantes de la ségrégation tendent à être plus élevées lorsque le degré d’urbanisation est plus fort. Tout d’abord, dans ces départements, la ségrégation résidentielle est plus forte, ce qui se traduit dans la composition sociale des collèges publics et privés. Ensuite, la proximité et le nombre des collèges exacerbent la concurrence entre établissements et peuvent inciter les familles à éviter le collège de secteur, principalement en recourant à un collège privé. Ces choix sont majoritairement faits par des familles de milieu social favorisé et tendent à accentuer la ségrégation. Les écarts de composition sociale entre secteurs public et privé sont forts dans les départements du bassin parisien, dans le sud méditerranéen et les départements et régions d’outre-mer (sans Mayotte où les collèges privés sont hors contrat et donc hors du champ de cette étude).
3) Des évolutions disparates de la ségrégation entre les départements
Entre 2014 et 2021, pour une moitié de départements, la ségrégation a peu varié, comme au plan national. Dans une vingtaine de départements, la ségrégation a diminué de façon plus sensible (baisse supérieure à 0,005). Ces départements sont majoritairement situés dans le nord et l’ouest de la métropole. La ségrégation entre collèges publics y a baissé, en moyenne, et les écarts de composition sociale entre secteurs public et privé n’y ont pas augmenté, voire ont diminué dans certains départements æfigure 7. Inversement, dans une vingtaine de départements, la ségrégation a augmenté, avec une hausse marquée des écarts de composition sociale entre secteurs public et privé. Ces départements se situent plutôt dans la moitié sud de la France. Ainsi, les évolutions de la ségrégation ne suivent pas les mêmes tendances d’un département à un autre. Ces différences pourraient refléter des politiques plus ou moins actives en matière de mixité sociale, mais aussi des différences de positionnement du secteur privé, ou encore de contexte démographique. Ainsi, les migrations des familles peuvent renforcer ou affaiblir la ségrégation sociale entre établissements, par l’intermédiaire de la ségrégation résidentielle. Or sur cette période, 6 % à 7 % des élèves de niveau collège ont changé de commune de résidence d’une année sur l’autre.
4) Téléchargement et utilisation des données
Les données sont à télécharger sur le site de la DEPP. Elles comprennent des statistiques à l'échelle départementale utilisées pour l'étude ainsi que l'ensemble des cartes et des graphiques. Pour en savoir plus sur le mode de calcul de l'indice d'entropie, il est possible de se reporter à cet article de la Depp paru en 2016.
Pour compléter
Acquis des élèves au collège : les écarts se renforcent entre la sixième et la troisième en fonction de l’origine sociale et culturelle (Note d'information de la Depp, n°25, avril 2015).
La ségrégation sociale entre les collèges. Quelles différences entre public et privé, aux niveaux national, académique et local ? (Éducation & formations n°91, septembre 2016).
La ségrégation sociale entre collèges. Un reflet de la ségrégation résidentielle nettement amplifié par les choix des familles, notamment vers l’enseignement privé (Insee Analyses, n°40, 2018).
L’Education nationale condamnée à révéler l’indice de position sociale des collèges et des CM2. Quels effets sur la mixité sociale ? (OZP, à partir de l'article du journal Le Monde).
Mixité sociale dans les collèges publics et privés de Toulouse selon le pourcentage de professions et catégories socio-professionnelles défavorisées (AEF).
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