Un Atlas de géographie historique des États-Unis (1932) entièrement numérisé

 

L'Atlas de géographie historique des États-Unis de Charles Paullin et John Wright, publié pour la première fois en 1932, a été numérisé et mis en ligne par l'Université de Richmond avec l'ensemble de ses 700 cartes. Il s'agit d'un magnifique atlas historique sur les Etats-Unis. Désormais accessible à un large public, la version numérique comporte des fonctionnalités intéressantes en termes de géolocalisation, d'animation ou d'impression que l'atlas papier ne permettait pas.



La plupart des cartes de l'atlas ont été orthorectifiées, afin de pouvoir être superposées à des cartes actuelles. Des cartes animées ont été produites à partir de séries de cartes concernant l'exploration du continent, les différents mouvements de réforme ou l'évolution de l'emplacement des églises.

Des cartes portant sur le vote présidentiel, la démographie ou encore la production agricole sont mises à disposition sous forme interactive de manière à pouvoir accéder plus en détail aux données sous-jacentes.

L'introduction met bien en évidence les objectifs de cet Atlas : 

« Le but est d'illustrer cartographiquement, dans un format maniable mais avec beaucoup de détails, les faits essentiels de la géographie et de l'histoire qui conditionnent et expliquent le développement des États-Unis. Il n'y a, bien entendu, aucun critère absolu permettant de mesurer l'importance relative des événements historiques. Le jugement historique, cependant, doit reposer sur la reconnaissance de relations fondamentales dans l'espace aussi bien que dans le temps, et celles-ci sont souvent rendues intelligibles au moyen de cartes [...] Alors que les cartes montrent comment les forces mondiales ont opéré sur le sol américain, elles mettent également l'accent sur ce qui est caractéristique des États-Unis. »

L'occasion de souligner le rôle important des sources et de revenir sur la question du rapport et du poids respectif de la carte et du texte dans un atlas :

« Le texte donne les références aux sources d'information à partir desquelles les cartes ont été élaborées. Chaque fois que nécessaire, des commentaires critiques sont faits sur l'exactitude des sources. La manière dont les cartes ont été compilées et ce que montrent les symboles est indiqué quand cela ne va pas de soi, les signes conventionnels sont expliqués sur les cartes elles-mêmes et, dans la mesure du possible, conçus pour raconter leur propre histoire. Les limites de la méthode de représentation sont indiquées et des explications sont fournies, si nécessaire, pour éviter les idées fausses. Certaines parties du texte sont très longues, en particulier les parties relatives aux terres et aux litiges frontaliers. Ici, les négociations concernant les limites et les zones contestées sont décrites et les documents originaux sont cités dans leur intégralité. Sans un commentaire aussi approfondi, les cartes n'auraient aucun sens. Pour autant, aucune tentative n'est faite pour interpréter ou expliquer les cartes en termes historiques plus larges. Le faire aurait obligé à développer le texte au-delà de toute mesure raisonnable. Cela aurait été équivalent à écrire une histoire des États-Unis d'un point de vue géographique, et l'Atlas ne prétend pas être une « histoire ». Il s'agit plutôt d'une aide aux historiens, aux enseignants et aux étudiants en histoire. Non seulement il servira d'ouvrage de référence à ceux qui souhaitent rechercher des points particuliers, mais des études originales seront sans aucun doute basées sur les données qu'il présente. Chaque carte constitue, pour ainsi dire, un moyen de raffiner la matière première pour la recherche historique, elle est comparable à un document soigneusement édité avec une critique textuelle mais sans interprétation historique. Le texte donne juste assez d'informations pour permettre au lecteur de bien comprendre ce que montrent les cartes. »

« Quelques desiderata cartographiques » :

« Dans les plans préliminaires et les suggestions faites par plusieurs chercheurs, de nombreuses cartes ont été proposées qui, pour une raison ou une autre, ont dû être refusées. Étant donné que la simplicité cartographique était souhaitée, aucune carte compliquée comportant de nombreuses informations n'a été incluse. N'ont trouvé place que les cartes illustrant les parties les plus fondamentales et les plus essentielles de l'histoire américaine, et encore pas toutes. Pour chaque période, des cartes ont été exclues du fait du manque de place. En raison de statistiques insuffisantes, de nombreuses cartes utiles pour la période coloniale n'ont pu être réalisées. On peut cependant donner quelques exemples de pistes de recherche qui pourraient être poursuivies dans des directions déjà tracées par l' Atlas. Alors que chaque phase de l'histoire américaine offre des possibilités séduisantes d'interprétation cartographique, une attention particulière est portée ici sur les questions concernant l'exploration et la colonisation du continent, la population des Etats-Unis, l'éducation et le développement économique. »

De la conception à la publication, l'atlas a nécessité trois décennies d'élaboration. Un aperçu de l'atlas a été proposé pour la première fois par John Franklin Jameson en 1902 lorsqu'il a proposé que la nouvelle institution Carnegie de Washington se charge de développer "un atlas de l'histoire américaine qui puisse être vraiment de premier ordre". Sous la direction de Paullin, un historien de la marine américaine, les recherches pour l'atlas ont commencé en 1912 au département de recherche historique de la Carnegie Institution, dirigé par Jameson. Les travaux sur l'atlas s'y sont poursuivis pendant quinze ans et, en 1929, la Carnegie Institution s'est arrangée pour que l'American Geographic Society (AGS) complète l'atlas. L'éminent géographe John K. Wright (qui sera à l'origine du terme de carte choroplèthe en 1938) était alors le bibliothécaire de l'AGS. Il a supervisé l'achèvement de l'atlas et a été crédité comme son éditeur lors de sa publication en 1932.

Largement acclamé dès sa publication, l'Atlas se veut être un « monument de l'érudition historique ». Il se concentre cependant principalement sur les Américains d'origine européenne - même s'il contient un certain nombre de cartes montrant la répartition géographique des personnes d'autres origines ethniques et raciales. Un atlas de géographie historique qui reflète donc son époque. L'Atlas est unanimement célébré dès sa parution en 1932. Dans les décennies qui suivent, il a été utilisé par d'innombrables historiens professionnels ou profanes. Quelques-unes de ses cartes (comme celles indiquant les temps de déplacement en 1800, 1830, 1858 et 1930) continuent d'être reproduites ou adaptées encore aujourd'hui.

Série de cartes montrant l'évolution des temps de déplacement depuis New York
en 1800, 1830, 1857 et 1930 (source : Atlas of the Historical Geography of the United States)



Consultation à partir des 14 chapitres proposés :

Le Digital Scholarship Lab de l'Université de Richmond est à l'origine d'autres travaux remarquables de numérisation et de publication de cartes historiques sur Internet :
  • Mapping Inequality Redlining in New Deal America : mise en ligne des archives de l'HOLC concernant la pratique du redlining dans plus de 150 villes des Etats-Unis.

  • Land Acquisition and Dispossession. Mapping the Homestead Act, 1863-1912. Le Homestead Act de 1862 offrait aux Américains la possibilité de revendiquer des parcelles de "terres publiques", de les occuper et de les mettre en valeur pendant cinq ans, puis d'en acquérir le titre. Cette carte visualise dans le temps et dans l'espace les plus de 2,3 millions de revendications et 900 000 "certificats" accordant la propriété dans le demi-siècle après l'adoption de la loi.

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