L'incendie de l'usine Lubrizol de Rouen et la cartographie des sites Seveso en France


Un important incendie s'est déclaré jeudi 26 septembre 2019 dans une usine Lubrizol. Lubrizol Corporation est une société de l'industrie chimique américaine créée en 1928 (elle-même propriété depuis 2011 de la holding Berkshire Hathaway du milliardaire Warren Buffett). L'entreprise dispose de trois sites en France. Le site de Rouen, fondé en 1954, abrite, outre le siège social, une usine de fabrication et de conditionnement d'additifs principalement pour lubrifiants. Le site industriel situé près du centre de Rouen est classé Seveso seuil haut. Le protocole Seveso est une directive européenne pour identifier les sites potentiellement dangereux et établir un plan de sécurité.

Quel est le périmètre de sécurité et les mesures à respecter face à ce type de risques technologiques ? Où se situent les sites Seveso en France ? Que dit la législation sur les PPRT, notamment celui de Lubrizol ?


I) L'impact de l'incendie de l'usine Lubrizol à l'échelle locale et régionale

Incendie de l'usine Lubrizol : notre carte du site pour mieux comprendre (LCI)

Incendie à l'usine Lubrizol de Rouen : quelle est la trajectoire du nuage noir ? (L'Express)

Incendie de l'usine Lubrizol à Rouen : pourquoi les autorités peinent à rassurer les populations depuis la catastrophe (France-Info).

Après l’incendie de l’usine Lubrizol à Rouen, des élus réclament « une totale transparence » (Le Monde)
 
Lubrizol, deux semaines après, où en sont les enseignants ? Le Café pédagogique, 9 octobre 2019.

Les gens du voyage, victimes invisibles de Lubrizol (Libération)
 





 





II) Les sites classés Seveso en France

En septembre 2019, la France compte 1 312 sites classés Seveso, dont 705 sites (plus de la moitié) sont en seuil haut. Ces sites sont soumis à des contraintes, comme par exemple la mise en place d'un Plan de prévention des risques technologiques (PPRT) et font l'objet de contrôles réguliers. C'est en Seine-Maritime que l'on trouve le plus grand nombre de sites Seveso (75 sites) devant les Bouches-du-Rhône (70 sites).

La directive Seveso et ses évolutions (Ministère de la Transition écologique et solidaire) :
http://www.installationsclassees.developpement-durable.gouv.fr/Risques-accidentels.html

Carte interactive. Y a-t-il un site industriel à risque Seveso près de chez vous ? (source : Sciences & Avenir)



Les sites Seveso en France (source : Le Parisien)
Cliquer sur Seuil Haut / Seuil bas et zoomer sur la carte pour plus de détails



Le portail Géorisques permet d'accéder à de nombreuses couches d'information sur la géographie des risques en France (types de risques, installations industrielles, plans de prévention des risques, etc...)
http://www.georisques.gouv.fr/cartes-interactives#/

2,5 millions de Français vivent à moins d’un kilomètre d’une usine Seveso, dont 1,1 million près d'une usine Seveso seuil haut (Le Monde)

À Rouen, l’histoire de l’implantation des sites Seveso sur la rive gauche. La Seine et Rouen accueillent depuis plus de deux siècles des activités polluantes et dangereuses, comme aimantées par le port (Paris Normandie).

Incendie de Rouen : les usines Seveso ont-elles encore leur place en ville ? (Le Point).

Le pétrole en basse Seine : des débuts balbutiants à un véritable « royaume » en Normandie
Du Havre à Rouen (Seine-Maritime), la basse Seine est depuis les années 1930 une région dédiée au raffinage du pétrole et à la pétrochimie (Paris Normandie).


III) La législation sur les PPRT et l'exemple du PPRT de Lubrizol

La loi n°2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages a introduit au niveau législatif le principe d’une étude de dangers basée sur une analyse de risque tenant compte non seulement de la gravité potentielle, mais, fait nouveau, de la probabilité d’occurrence des accidents, et justifiant les mesures permettant de réduire la probabilité ou la gravité des accidents. Elle prévoit l’élaboration de plans de prévention des risques technologiques (PPRT). Leur objectif est de résoudre les situations difficiles en matière d’urbanisme héritées du passé et mieux encadrer l’urbanisation future.

Les Plans de prévention des risques technologiques ont pour but de limiter l’exposition de la population aux conséquences des accidents et d’éviter, si possible, qu’une telle situation se renouvelle dans l’avenir. Les PPRT délimitent, autour des installations classées à haut risque (AS), des zones à l’intérieur desquelles :
  • des prescriptions peuvent être imposées aux constructions existantes et futures et des constructions futures peuvent être interdites ;
  • l’expropriation est possible pour cause de danger très grave menaçant la vie humaine ;
  • les communes peuvent donner aux propriétaires un droit de délaissement pour cause de danger grave menaçant la vie humaine ;
  • les communes peuvent préempter les biens à l’occasion de transferts de propriétés. 
Site national des Plans de préventions des risques technologiques (PPRT)
http://www.installationsclassees.developpement-durable.gouv.fr/-Site-national-PPRT-.html

Guide méthodologique des PPRT (à partir de l'exemple du Grand Est)
http://www.grand-est.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Guide_PPRT.pdf


Le problème déborde la question de l'exposition aux risques qui relève du PPI et du PCS (lire l'article de Paris Normandie, "Lubrizol : la population s’interroge sur la réactivité du système d’alerte"). La démarche PPRT est plus large. Elle peut être l’occasion de promouvoir un projet urbain d’ensemble qui intègre la gestion du risque industriel et favorise un redéploiement des activités exposées sur un périmètre plus vaste que celui du PPRT. Le tracé du périmètre du PPRT comme celui du projet urbain sont souvent au coeur des débats.

 
Dans le cas de l'usine Lubrizol, la mise en place du PPRT semble s'être effectuée de manière disjointe du reste du tissu urbain.

Le PPRT autour de l'entreprise Lubrizol a été mis en place en 2014 (voir carte page 84) :
http://www.seine-maritime.gouv.fr/content/download/15927/107728/file/pprt_LUB_NP_PETIT-QUEVILLY_LE_ROUEN.pdf

Le plan de prévention des risques chez Lubrizol soumis à enquête publique (France3, 2013)



Dès 2010, une réunion du Comité local d'information et de concertation (CLIC) fait apparaître "la difficulté de pouvoir apprécier le périmètre du PPRT de Lubrizol par rapport au PPRT de Rouen ouest" et le fait que "le PPRT de Lubrizol s'arrête juste à la limite de l'éco-quartier Flaubert". Selon la DEAL, "un PPRT n'a pas vocation à tout résoudre" et il s'agit de "réduire les deux périmètres".
http://www.normandie.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/compte-rendu_reunion_du_15_octobre_2010.pdf


IV) Analyses et réflexions sur les liens entre risques, aménagements et territoires

Incendie Lubrizol : faut-il vraiment construire un éco-quartier près de l'usine SEVESO ? (France3 régions)
 

En vert, les limites du futur éco-quartier Flaubert, en rouge l'usine SEVESO • © Google Map

Après la catastrophe d'AZF à Toulouse en 2001, une prise de conscience a commencé à émerger. Mais qu'il s'agisse de Lubrizol à Rouen ou de la vallée de la chimie au sud de Lyon, des sites Seveso se trouvent toujours à proximité des zones urbanisées.

A Rouen, la mise en pièces d’une identité verte (Libération).



Déjà en 2013, l'entreprise avait été mise en cause pour des fuites de gaz : "Fuite de gaz à Lubrizol : prévention et réaction défaillantes" (Le Monde, 2013).

Accidents industriels : la prévention à moitié (Terraeco).

Lubrizol : le préfet a donné son feu vert à des augmentations de capacités sans évaluation environnementale (Actu environnement).

Incendie à Rouen : « La régulation des risques et des pollutions protège avant tout l’industrie » (Le Monde).
« Le nuage s’arrête à la frontière » : de Tchernobyl à Rouen, itinéraire d’un mensonge qui n’en était pas un (Le Parisien).

Deux caricatures de Plantu à propos de l'incendie de Lubrizol (sur le blog de Pierrick Augier)



Lubrizol-Rouen 2019 : catastrophe environnementale et crise de l’aménagement du territoire (Métropolotiques.eu).

Incendie de l'usine de Rouen : un rapport alarmant sur les risques industriels en France (Sciences et avenir).

Pour que Lubrizol brûle jusqu’au Grand-Paris (Visionscarto). Ou comment relire le territoire à la lumière d'un nuage toxique.


V) Pistes d'exploitation pédagogique

Etude de cas en classe de Seconde : L'incendie de l'usine Lubrizol à Rouen, une catastrophe industrielle ? (Joël Mariteau)

Incendie de l’usine Lubrizol de Rouen, conséquences multiscalaires d’un accident industriel (Lycée professionnel, CAP) : travailler sur l’accident industriel de Rouen avec de nouvelles fonctionnalités Édugéo (Antoine Vaillant)

Les sociétés face au risque industriel : l’exemple de Lubrizol (Jean-Christophe Fichet, Cartolycée). Avec un regard sur la géographie du risque industriel au XXe siècle à travers les données fournies par l’EM-DAT qui fournit une base de plus de 22.000 catastrophes depuis 1900.

Etude de cas : Les risques industriels dans l'agglomération havraise (sujet d’étude : "Les sociétés face aux risques technologiques"). Une séquence pédagogique en Géographie 2nde Bac Pro proposée sur le site de l'académie de Rouen.

Avec 23 usines Seveso, comment Le Havre est-il préparé à une catastrophe ? (Actu.fr) Avec la carte des 17 sites Seveso seuil haut à consulter ou à télécharger sous forme de kmz (Google Maps).


Lien ajouté le 8 octobre 2020

Lien ajouté le 21 septembre 2021

Lien ajouté le 4 août 2022


Lien ajouté le 7 août 2022

Renaud Bécot et Thomas Le Roux, La rhétorique inchangée des pollutions industrielles (Le Monde, 20 juin 2022). Les deux historiens montrent que la législation environnementale n'a toujours pas pris la mesure du l'accroissement des risques.


Lien ajouté le 7 janvier 2023

Interview de Paul Poulain spécialiste des risques industriels par Elise Lucet dans Envoyé Spécial (6 janv. 2023).



Lien ajouté le 3 février 2024
Articles connexes


La carte, objet éminemment politique : l'Observatoire des violences industrielles

MapQuote : la carte des citations cartographiques


Simple évocation ou description fine, nombreux sont les romans qui évoquent la cartographie.  MapQuote est un projet libre initié par Françoise Bahoken et Nicolas Lambert sur le blog Néocarto :
http://neocarto.hypotheses.org/6502


Ce projet collaboratif prend la forme d’une carte interactive où chaque utilisateur peut déposer une citation de romans où il est question de cartes.

L’information cartographiée est répartie dans différents fichiers :
  • Un fichier auteurs référençant leurs noms et leurs lieux de naissance;
  • Un fichier biblio référençant les livres au format BibText ;
  • Un fichier mots référençant les termes ciblés (cartographie, cartes, planisphère, mappemonde, etc.);
  • Et bien sûr, un fichier citations.
A ce jour, MapQuote contient des centaines de citations déjà référencées. Pour enrichir encore ce corpus, les auteurs font appel à vous. Vous êtes invités à contribuer au projet en cliquant sur ce lien qui vous donne accès à un formulaire de saisie :


Articles connexes :

Cartes des pistes cyclables en Europe et en France : vers une cartographie collaborative

Organiser un mapathon ou une séance de cartographie participative en classe


L'histoire par les cartes : l'Atlas historique mondial de Christian Grataloup en partenariat avec la revue L'Histoire


L’histoire de l’Humanité racontée en 515 cartes

Depuis sa création en 1978, la revue L’Histoire publie des articles d’historiens faisant état des dernières avancées de leurs recherches. Ces textes sont souvent enrichis d’une ou plusieurs cartes. En partant de ce fonds cartographique exceptionnel, Christian Grataloup a sélectionné, recréé et commenté 515 cartes racontant la marche du monde, des origines de l’Humanité à aujourd’hui.

Atlas historique mondial de Christian Grataloup (édition Les Arènes, 2019)



Comme le souligne Patrick Boucheron qui a rédigé l'introduction de l'ouvrage, « la géographie est une école de la précision historique, et la carte qui résulte de cet effort donne à voir un moment dans l'aventure de la connaissance du passé ». Christian Grataloup, déjà auteur avec Gilles Fumey de L'Atlas global, explique que dans l'Atlas historique mondial il s'agit de « s'émanciper d'un Grand Récit eurocentré ».

La mondialisation opère sans conteste, depuis son irruption dans les années 1970, une remise en cause de nos modes de pensée. Longtemps l’histoire comme la géographie ont été envisagées dans le cadre d’un modèle européo-centré. En témoignaient par exemple les programmes du secondaire qui, jusque dans les années 1970, commençaient par l’étude de l’Europe, puis du Monde et enfin comme point d’aboutissement, la France. C’est à partir des années 1980 que ce découpage du monde commence à être remis en question avec le développement des subaltern studies, qui critiquent la vision d'une "histoire tunnel" comme le souligne Vincent Capdepuy, Histoires de mondialisations de Néandertal à Wikipédia (voir son interview ainsi que son billet sur le blog Histoire globale). Symptôme de cette évolution, le changement de vocabulaire : à partir des années 1980 on utilise des termes spatiaux au lieu de termes temporels : par exemple l’expression "Nord / Sud" qui remplace "développement / sous-développement". La mondialisation remet en cause notre européano-centrisme et nous oblige à repenser les relations entre « nous et les autres ».

« Pourquoi l’histoire globale est-elle une géographie ? » (extrait d'une conférence de Ch. Grataloup)



Christian Grataloup et la géohistoire 

Christian Grataloup est présenté sur le site de l'éditeur comme « le plus historien des géographes ». Professeur émérite à l’université Paris Diderot, il est l'auteur de nombreux ouvrages qui remettent en cause les frontières entre histoire et géographie : « L’invention des continents. Comment l’Europe a découpé le monde » (2009), Géohistoire de la mondialisation (Armand Colin, 2015), Faut-il penser autrement l’histoire du monde ? (Armand Colin, 2011), L’Atlas global (Les Arènes, 2014 et 2016).

 La différence entre le mondial et l'international (extrait de L'Atlas global de Ch. Grataloup)


Pour rappel, il a fondé en 1975 avec Jacques Lévy Espace-Temps, une revue novatrice largement ouverte aux autres sciences humaines sociales et consultable aujourd’hui en ligne. Le sous-titre de la revue est révélateur d’une recherche constante de la pluridisciplinarité pour un auteur qui s’intéresse également à l’anthropologie et à la didactique : revue « indisciplinaire ». De l’« indisciplinaire » à l’indiscipliné il n’y a qu’un pas : clin d’œil aussi peut être à une démarche, qui en pleine crise épistémologique de la géographie, celle des années 1970, est venue bouleverser la géographie dite « classique » qui prévalait jusque-là.

L’objectif de ce courant que l’on nomme aujourd'hui géohistoire consiste à dégager une analyse des sociétés sur le temps long et à différentes échelles. Il s’agit de dépasser les vieilles querelles entre historiens et géographes, « deux disciplines qui ne devraient pas être séparées », souligne Christian Grataloup. L’avantage du géographe dans l’étude du temps long réside dans la possibilité de s’affranchir de la chronologie. On pourrait dire avec humour que si la vision des géographes est moins profonde que celle des historiens, elle est plus large. Pour Christian Grataloup, « l’histoire globale est avant tout une géographie »  il s'agit de faire de l’histoire-géographie globale, de penser un monde de plus en plus connecté et interdépendant afin d’éviter le « chacun chez soi » de la carte de Samuel Huntington.

La cartothèque de la revue L'Histoire

La revue L'Histoire donne accès aux très nombreuses cartes publiées dans les articles de la revue. Ces cartes couvrent l'histoire des civilisations selon une approche en partie nouvelle qui est celle de l'histoire globale. Le moteur de recherche permet de chercher une carte spécifique, par aire géographique d'abord et par période ensuite (et non l'inverse comme le font souvent les atlas historiques) :
https://www.lhistoire.fr/carte/

Pour accéder directement aux cartes de l'Atlas historique mondial :
http://www.lhistoire.fr/atlas

Cinq cartes pour comprendre un monde qui change (France Culture)
Le géohistorien Christian Grataloup, professeur émérite à l’université Paris-Diderot, vient de faire paraître un "Atlas historique mondial" qui vise à raconter la marche du monde par les cartes. Retrouvez cinq d'entre elles sélectionnées parmi les 515 que compte l'ouvrage.

Les frontières dans les nouveaux programmes – Table ronde sur l’ « Atlas historique mondial – L’Histoire – Les Arènes » au FIG 2019 (Les Clionautes). Un compte-rendu à l’intention des collègues enseignants avec les cartes numériques de l’Atlas reproduites au format pdf.

Cartes publiées par Légendes carto


En complément

Christian Grataloup et François-Xavier Fauvelle : « Les atlas historiques sont des laboratoires scientifiques même quand ils sont destinés à un public assez large » - Interview pour le Monde des livres (vendredi 4 octobre 2019)
"L'un des objectifs que je m'étais fixé était de présenter l'ensemble des sociétés, y compris celles qui n'ont pas connu de formes étatiques, y compris les peuples dits premiers - les peuples réputés naguère sans histoire, comme les Inuits. De même avec les Polynésiens, les Bantous... Nous avons multiplié les types de cartes pour avoir l'ouverture la plus grande possible."

François-Xavier Fauvelle a publié, avec Isabelle Surun, un Atlas historique de l'Afrique aux éditions Autrement. Cet atlas montre combien ce continent, loin d'être replié sur lui-même, a toujours été à la fois dynamique et connecté à l'histoire globale (voir la table des matières). Ecouter sa leçon inaugurale au Collège de France : "Une histoire non pas maison, mais jardin où s'entremêlent les souches". Voir également 24 images pour désencombrer l'histoire de l'Afrique (Rendez-vous de l'Histoire, Blois 2018).









Les évolutions de l'Indice de Développement Humain (IDH) : vers un indicateur infranational ?


Publié presque tous les ans depuis 1990, l’Indice de développement humain (IDH) est devenu l’indicateur phare du PNUD et fait désormais partie des indicateurs de référence permettant d’évaluer le développement socio-économique des pays à l'échelle mondiale. L’IDH est une mesure de synthèse ou moyenne à pondération égale (une même valeur 1 est accordée à chaque dimension) qui prend en compte l’espérance de vie, l'alphabétisation et la scolarisation ainsi que le niveau de vie (Produit National Brut par habitant).

La carte de l'IDH en 2022 (source : Our World in Data)
Cliquer au bas de la carte pour changer l'année ou accéder aux données


Accès aux données de l'IDH 1990-2022 (à télécharger sur le site du PNUD) :
http://hdr.undp.org/en/indicators/137506

L'IDH fait l'objet de critiques que l'on peut regrouper en trois grandes catégories (Garabedian & Hoarau, 2011) :
  • celles montrant les limites de l’indicateur comme mesure efficace du développement à cause de la qualité et de la disponibilité des données nécessaires à sa construction ;
  • celles qui mettent en évidence les limites techniques de l’outil ;
  • celles soulignant le besoin d’intégrer des informations cruciales supplémentaires dans l’indicateur, notamment en termes d’inégalités dans la distribution des dimensions à l’intérieur d’une même population.
L'IDH a lui-même évolué et a donné lieu à des indicateurs plus spécifiques comme l’Indicateur Sexospécifique de Développement Humain (ISDH), l’Indice de Participation des Femmes (IPF),  l’Indice de Pauvreté Humaine (IPH) ou encore l'Indice de Pauvreté Multidimensionnelle (IPM).

Dans le cadre des Objectifs de Développement Durable (ODD), les Nations Unies ont inclus la « réduction des inégalités entre les pays et à l’intérieur des pays » comme l’un des principaux objectifs à atteindre d'ici 2030. Un nouvel indice de développement humain à l'échelle infranationale (SHDI) a été mis en place afin de mettre en évidence les disparités à l'intérieur des pays.

Indice de développement humain à l'échelle infranationale (source : Smits & Permanyer


Accès aux données du SHDI sur le site du Global Data Lab :
http://globaldatalab.org/shdi/

Accès aux fichiers shp (pour intégration dans un SIG) :
http://globaldatalab.org/shdi/shapefiles/

Vue détaillée de la carte sur MapPorn

L'indicateur de développement humain infranational (SHDI) est disponible dans 160 pays et couvre 1 600 unités géographiques (99% de la population mondiale). Son calcul est identique à celui de l'IDH avec les quatre indicateurs (PNB/hab, espérance de vie, alphabétisation et scolarisation). Dans les pays où ces indicateurs ne sont pas disponibles au niveau infranational, ils ont été estimés à partir des informations disponibles. Les indicateurs sont construits de manière à ce que leurs moyennes nationales soient égales aux valeurs nationales du PNUD. Au niveau national, le SHDI est donc égal à l'IDH officiel de chaque pays.

La carte montre les variations infranationales du développement humain pour l'année 2015. Elle permet d'avoir une image plus nuancée que la carte de l'IDH par pays. La distribution des valeurs de SHDI permet d'identifier les groupes de développement humain élevé, moyen et faible, qui dépassent parfois les frontières nationales. C’est le cas dans les régions très développées entourant les Alpes (notamment en France, Suisse, Allemagne, Autriche et Italie), dans les régions côtières moyennement développées situées dans le golfe de Guinée (Nigeria, Ghana, Togo, Bénin Cameroun, Guinée équatoriale, Gabon) ou dans les régions les moins développées des pays d’Afrique subsaharienne (Burkina Faso, Mali, Niger, la République centrafricaine, Soudan du Sud).

Bien que plus précis que l'IDH par pays, l'indicateur de développement humain infranational soulève de nouvelles questions (Hammouda, 2012). Quelle est la plus petite unité territoriale où les différentes données nécessaires au calcul de l’IDH sont disponibles ? Faut-il opter pour un regroupement préétabli (a priori) ou procéder à un regroupement de ces unités primaires a posteriori en fonction de leur IDH ? Au delà de l'intérêt et des limites de cet indicateur composite se posent donc des problèmes de choix de la maille territoriale.

Références

Mesurer le développement : la carte de l’IDH 2017(Cartolycée).

Improved Subnational HDI of the World (MapPorn).

Jérôme Accardo, Fabrice Murat, Gaël de Peretti, L’indice de développement humain : une approche individuelle, INSEE.

Nacer-eddine Hammouda, Approche méthodologique pour le calcul des Indicateurs de Développement Humain au niveau infranational, Les cahiers du CREAD n°102-2012

Lien ajouté le 1er mars 2020
 

Carte de l'espérance de vie à l'échelle infranationale en 2018 (MapPorn)
Lien ajouté le 6 mai 2020
Liens ajoutés le 18 janvier 2024

DOSE – Ensemble de données mondiales sur la production économique infranationale déclarée (article de la revue Nature avec données disponibles)
https://www.nature.com/articles/s41597-023-02323-8

Estimation du produit intérieur brut agricole local (AgGDP) à travers le monde (article de la revue Earth System Science avec données disponibles)
https://essd.copernicus.org/articles/15/1357/2023/

Lien ajouté le 10 février 2024
Lien ajouté le 2 mai 2025

Le Global Data Lab a produit un nouvel ensemble de données sur l'IDH à l'échelle infra-nationale encore plus précis. Il
 ajoute des estimations HDI au niveau des pixels (à une résolution d'environ 10 km). Ceci est plus granulaire que l'ensemble de données du Global Data Labs réalisées au niveau HDI admin-2.

Accès à l'article scientifique :
Luke Sherman, Jonathan Proctor, Hannah Druckenmiller, Heriberto Tapia & Solomon M. Hsiang (2023). Global High-Resolution Estimates of the United Nations Human Development Index Using Satellite Imagery and Machine-learning, https://www.nber.org/papers/w31044

Liens ajoutés le 2 octobre 2025

« Doughnut of social and planetary boundaries monitors a world out of balance » (Nature)

Andrew Fanning et Kate Raworth montrent que, malgré un PIB mondial qui a plus que doublé entre 2000 et 2022, des milliards de personnes restent privées de besoins essentiels, tandis que la planète dépasse ses limites écologiques. Aucun pays n’atteint l’équilibre entre justice sociale et respect des limites écologiques. Les pays riches parviennent souvent à assurer les besoins de base, mais au prix d’une forte surconsommation. Les pays pauvres, eux, restent marqués par des manques sociaux persistants. Les chercheurs plaident pour dépasser le PIB, indicateur limité qui masque ces déséquilibres. Ils insistent sur la nécessité d’économies régénératives, capables de restaurer les écosystèmes, et distributives, en mesure de réduire les écarts entre sociétés et entre pays.

« La PIB Mania nous mène à l’extinction : la nouvelle étude du Donut est sans équivoque » (Bon Pote)

Proposé pour la première fois par Kate Raworth dans un working paper d’Oxfam en 2012, le donut est une représentation graphique de la situation sociale et écologique du monde, d’un pays, d’une ville, ou même d’une organisation. On y retrouve deux cercles concentriques. L’intérieur du donut (la fondation sociale) est composée d’une douzaine de minima sociaux sous lesquels il ne faudrait pas tomber ; son périmètre extérieur (les plafonds écologiques) rassemble les différentes limites planétaires qu’il faudrait se garder de dépasser. La zone en vert entre le plancher social et le plafond écologique représente « un espace sûr et juste pour l’humanité ».

« Un aperçu de "l'économie du donut" : pourquoi la résolution de la crise planétaire dépend de la croissance des pays du Sud » (The Conversation)

Carol Tomaz, doctorante à l’Université de Brasilia, explore la théorie de "l’Économie Donut" de Kate Raworth, qui lie équilibres écologiques et justice sociale. Son article souligne l’urgence d’un modèle de prospérité adapté au Sud global face à la crise planétaire. 
Le modèle du Donut définit deux anneaux : la base sociale (santé, éducation, égalité) et le plafond écologique (climat, biodiversité, eau). Entre les deux se trouve l’espace "sûr et juste" où l’humanité peut prospérer sans épuiser la Terre. Or, les données de 2025 montrent un double déséquilibre : déficit social dans les pays pauvres et excès écologique dans les pays riches. 85% de la population mondiale vit sous la "ligne de pauvreté sociale" malgré une surexploitation croissante des ressources. Le concept remet en cause le modèle économique dominant fondé sur la croissance illimitée du PIB. Ce paradigme ignore la finitude écologique et l’injustice sociale, deux réalités que le Donut replace au centre de la réflexion sur le développement.Les chercheurs rappellent que le Sud global ne peut adopter un modèle de "décroissance" sans d’abord atteindre la base sociale. En Afrique subsaharienne, 85% des habitants restent sans électricité, et au Brésil, 28,5 millions souffrent d’insécurité alimentaire. Le Donut devient alors un processus en deux temps : un "croissance juste" pour assurer les besoins essentiels, puis une phase de stabilisation éco-sociale. Cette transition doit intégrer des pratiques culturelles et indigènes fondées sur la suffisance et la justice. L’économie du Donut offre ainsi une boussole pour habiter durablement la planète. En reliant justice sociale et sobriété écologique, elle redéfinit la prospérité comme équilibre, non comme expansion. Le défi reste immense pour le Sud global. 


État actuel du déficit et du dépassement des limites sociales et planétaires à l’échelle mondiale (source :  Fanning et Raworth, 2025)
Lien ajouté le 27 octobre 2025

« Classement : Les plus grandes économies du monde en 2026 » (Visual Capitalist)

Selon le rapport d’octobre 2025 publié par le Fonds monétaire international (FMI), les perspectives de l’économie mondiale pour 2026 sont prudentes. L'organisation affirme que la croissance mondiale ralentit dans un contexte de fragmentation et de montée du protectionnisme. Des risques de baisse importants existent, allant d'une éventuelle réévaluation des valeurs technologiques à une érosion de l'indépendance institutionnelle susceptible d'affaiblir les décisions politiques. Le site Visual Capitalist Néanmoins, nous examinons chaque année la répartition du PIB de chaque pays, en utilisant les projections 2026 du datamapper du FMI. Cette infographie montre comment les 124 000 milliards de dollars du PIB mondial nominal prévus en 2026 par le FMI seront répartis entre les pays. Il faudrait pouvoir rapporter l'importance des économiés également à d'autres indicateurs : population, émissions de CO2, ressources en eau, budgets militaires, consommation énergétique... un peu comme le fait le site de l'ONU par rapport aux ODD. Il est possible d'utiliser le simulateur Earth4All pour tester l'impact des politiques publiques sur ces indicateurs.


Articles connexes

Le calcul de l'IDH prend désormais en compte les pressions exercées sur la planète (IDHP)

Calculer l'indice de richesse relative à une échelle infra-nationale pour les pays pauvres ou intermédiaires

Étudier les migrations à l'échelle infranationale pour l'ensemble des pays du monde

Cartographie de la qualité des données d'enquêtes dans 33 pays d'Afrique subsaharienne



Le rapport du GIEC sur l'océan et la cryosphère (septembre 2019)


Dans leur rapport sur les mers et les glaces publié en septembre 2019, les scientifiques du GIEC alertent sur les risques liés au réchauffement climatique.

Special Report on the Ocean and Cryosphere in a Changing Climate (IPCC) :
http://www.ipcc.ch/srocc/home/

Voir le communiqué de presse (résumé) en français :
http://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/sites/3/2019/09/SROCC_PressRelease_FR.pdf

"Le réchauffement planétaire a déjà atteint 1 °C au-dessus des niveaux préindustriels, en raison des émissions passées et actuelles de gaz à effet de serre. Il existe un nombre considérable de preuves indiquant que ce réchauffement a de graves conséquences sur les écosystèmes et les populations. L’océan se réchauffe, devient plus acide et moins fécond. La fonte des glaciers et des calottes glaciaires entraîne une élévation du niveau de la mer et les phénomènes côtiers extrêmes sont de plus en plus intenses", constate le Giec dans son rapport révélé le 25 septembre. "Si nous réduisons fortement les émissions, les conséquences pour les populations et les moyens d’existence n’en seront pas moins éprouvantes, mais elles pourraient être plus faciles à gérer pour les populations les plus vulnérables", a indiqué M. Lee.

Selon le rapport, alors que le niveau de la mer a augmenté d’environ 15 cm à l’échelle mondiale au cours du XXe siècle, cette hausse est actuellement plus de deux fois plus rapide – 3,6 mm par an – et continue de s’accélérer. La hausse du niveau moyen des mers va accentuer les inondations, l'érosion des côtes, la pénétration du sel dans les nappes d'eau douce. Aujourd'hui 680 millions de personnes vivent dans des régions situées à moins de 10 mètres d'altitude et elles seront sans doute au moins 1 milliard en 2050.

Le rapport pointe également d'importantes modifications des écosystèmes en haute montagne avec des effets en aval. "À mesure que les glaciers de montagne reculent, ils modifient également la disponibilité et la qualité de l’eau en aval, ce qui a des répercussions sur de nombreux secteurs comme l’agriculture et l’hydroélectricité. La variation des quantités d’eau disponibles n’affectera pas seulement les populations de ces régions de haute montagne, mais aussi les communautés situées beaucoup plus en aval. La fonte des glaces entraine une hausse du niveau de la mer qui pourrait atteindre un mètre d'ici la fin du siècle."

Ce rapport du GIEC de 800 pages s'appuie sur de très nombreux travaux scientifiques (104 auteurs de 36 pays, 7000 publications référencées). Il comporte des graphiques et des cartes qui peuvent appuyer les cours.

En complément

Le laboratoire de visualisation de la NASA a publié une vidéo à base d’images satellites montrant la réduction de l'étendue de la banquise sur la période 1984-2019. La vidéo permet de suivre le rythme saisonnier et l’inexorable diminution de la banquise pérenne.
Accès à la vidéo téléchargeable et aux commentaires :

Accès à la base de données EASE-Grid Sea Ice Age :
http://nsidc.org/data/nsidc-0611/versions/4



Millénaire 3, le site de prospective de la métropole de Lyon, propose une série de 11 infographies pour illustrer la notion d'Anthropocène, dans le cadre d'une étude intitulée Comprendre (et éviter) les menaces environnementales de l'anthropocène. Ces infographies résument l’état des lieux dressé par les scientifiques et présentent quelques pistes pour limiter les processus les plus préoccupants.
Lien ajouté le 9 août 2021

Lien ajouté le 16 avril 2024
Articles connexes

Rapport du Giec 2021 : le changement climatique actuel est « sans précédent »

La France est-elle préparée aux dérèglements climatiques à l'horizon 2050 ?

Les villes face au changement climatique et à la croissance démographique

Comment la cartographie animée et l'infographie donnent à voir le changement climatique

La mobilisation mondiale des jeunes pour le climat en cartes

Eduquer à la biodiversité. Quelles sont les cartes, les données... et les représentations ?

Cartographier l'empreinte humaine à la surface du globe

La cartographie des déchets plastiques dans les fleuves et les océans

La carte de protection des océans proposée par Greenpeace pour 2030 : utopie ou réalisme ?

Resource Watch, un portail intégré pour visualiser des jeux de données en vue d'assurer "un avenir durable" à la planète