La Maison Blanche a publié le 29 septembre 2025 un plan de retrait de Gaza. Le plan de paix global présenté par Donald Trump prévoit un retrait progressif de l’armée israélienne de Gaza et la reconstruction de la région au bénéfice de sa population, durement touchée par des années de conflit. Ce "plan de paix", qui s'apparente plus à une tentative de cessez-le-feu, a été salué par la France et la communauté internationale. Mais il ne fait pas l'unanimité parmi les belligérants. L’accord propose un retrait progressif de l’armée israélienne de la bande de Gaza, mais reste flou sur la question palestinienne.
Légende du plan :
- en bleu : contrôle actuel par les Forces de défense israéliennes (FDI)
- en jaune : 1er retrait juste après la libération des otages
- en rouge : 2ème retrait lorsqu’une Force internationale de stabilisation (FSI) sera mobilisée
- en hachure : 3ème retrait, zone tampon de sécurité.
La légende du plan prévoit un retrait progressif de Tsahal sans pour autant de fixer de dates précises. Le 1er retrait est conditionné à la libération des otages, le 2nd retrait est conditionné à la mobilisation d'une force internationale de stabilisation, le 3e retrait viserait à terme former un tampon de sécurité.
Le plan en 20 points présenté par Donald Trump après son entretien avec Benyamin Nétanyahou est en retrait par rapport au projet franco-saoudien adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies. Même s’il connait un début d’exécution, il n’ouvre pas la voie à une solution politique. Le rêve de riviera ("Côte d'Azur du Moyen Orient") ébauché par Donald Trump en février 2025 n'est pas mort. Et un revenant, le premier ministre britannique Tony Blair, participe à sa résurrection.
« Le Plan Trump pour Gaza : des espoirs et des doutes » (L'Essentiel du Dessous des cartes - Arte)
L'émission résume, cartes à l'appui, les principaux enjeux de ce "plan de paix" qui suscite des débats. Si le plan de paix américain suscite de nombreux espoirs, des questions demeurent sur la bonne foi des belligérants à qui il est demandé de s’effacer derrière une "Autorité de transition pour Gaza" et une "Force internationale de stabilisation temporaire", constituée notamment de partenaires arabes. D’autres questions abyssales restent également en suspens.
« Plan Trump pour Gaza : un plan pour la paix ou un plan en trompe-l’œil ? » (28 minutes - Arte)
Sans reconnaître explicitement l'Etat palestinien, le plan semble ouvrir la porte à un cessez-le-feu. Mais tous les acteurs n'y voient pas la même chose...
« Le plan Trump pour Gaza : les acteurs de la région » (L'Essentiel du Dessous des Cartes, Arte)
Le président américain a posté sur Truth Social une carte indiquant une première ligne de retrait de l'armée israélienne, mais aussi une zone tampon entrant plus profondément dans le territoire gazaoui que ce qui semblait avoir été convenu. Parallèlement, les négociations autour du "plan Trump" pour Gaza s'ouvrent en Égypte avec les principaux acteurs de la région.
Sur la nouvelle carte sans légende partagée par Trump le 4 octobre 2025, une ligne jaune coupe le territoire en deux. Celle-ci correspondrait au premier retrait de l'armée israélienne dans la zone après la libération des otages. "Après des négociations, Israël a accepté la ligne de retrait initiale, que nous avons montrée et partagée avec le Hamas", écrit Donald Trump dans la publication. Contrairement à la carte dévoilée par Washington le 29 septembre, on ne retrouve par l'idée de retrait progressif de Tsahal. Il y a donc du flou pour cette nouvelle carte, avec un contrôle de l'armée israélienne qui serait plus important que ce qui a été proposé auparavant au Hamas. En effet, la ligne de contrôle israélienne se situerait au minimum à deux kilomètres à l'intérieur de la bande de Gaza. En outre, Israël continue de contrôler tous les points de passage entrant et sortant de Gaza, y compris le point de passage de Rafah avec l’Égypte. Si Benyamin Netanyahou a affirmé qu'Israël ne se retirerait pas entièrement de la bande Gaza, à l'inverse, le Hamas demande un retrait total et s'oppose à l'idée d'une zone tampon contrôlée par Israël.
La ligne de retrait initial de l'armée israélienne dans la bande de Gaza, selon le plan de paix de Trump proposé fin septembre. - Truth Social @Donald Trump
Dans la première phase du plan de cessez-le-feu, Israël conserverait le contrôle de près de 60 % de la bande de Gaza, comme le montre une carte plus détaillée publiée par le quotidien Aljazeera. Conformément au plan, l'armée israélienne s'est retirée jusqu'à la « ligne jaune »/ Des observateurs font remarquer qu'Israël garde ainsi le contrôle sur la plupart des terres arables.
La "ligne jaune" : nouvelle ligne provisoire de découpage du territoire gazaoui (source : AFP)
« Israël maintient son contrôle plus profondément que prévu à l'intérieur de Gaza, selon de nouveaux marqueurs frontaliers ? » (BBC)
Selon une analyse de BBC Verify, l'armée israélienne exerce un contrôle sur une plus grande partie de Gaza que prévu par l'accord de cessez-le-feu avec le Hamas. L'armée israélienne place des blocs de béton jaunes pour délimiter la nouvelle ligne jaune établie à Gaza. Le problème est qu'elle est décalée de plus de 500 mètres dans certaines zones, réduisant ainsi la zone de sécurité palestinienne. Il y a eu un manque constant de clarté quant à l'endroit exact où la frontière sera imposée , avec trois cartes distinctes publiées par la Maison Blanche, Donald Trump et l'armée israélienne à l'approche de l'accord de cessez-le-feu entré en vigueur le 10 octobre. Le 14 octobre, l'armée israélienne a publié la dernière version marquant la ligne jaune sur sa carte en ligne, qui est utilisée pour communiquer sa position aux habitants de Gaza. Mais dans le nord, près du quartier d'al-Atatra, des images de drones de Tsahal ont montré qu'une ligne de six blocs jaunes se trouvait jusqu'à 520 mètres plus loin à l'intérieur de la bande de Gaza que ce que l'on aurait pu attendre des cartes de Tsahal. Une situation similaire a été observée dans le sud de Gaza, où une image satellite prise le 19 octobre a montré dix bornes érigées près de la ville de Khan Younis. La ligne de blocs s'étend entre 180 et 290 mètres à l'intérieur de la Ligne jaune tracée par Tsahal. Si ces deux sections de frontière étaient typiques de la manière dont les marqueurs étaient placés le long de la totalité de la ligne, alors Israël exercerait un contrôle sur une zone nettement plus grande que celle prévue par l’accord de cessez-le-feu. Certains habitants ont dit à l’Agence France-Presse ne pas connaître clairement les limites exactes de la « ligne jaune », qui délimite la zone derrière laquelle l’armée israélienne s’est repositionnée depuis le cessez-le-feu, et que l’armée a commencé à matérialiser avec des blocs de béton jaunes. Cette dernière s’étend du nord au sud, à travers plusieurs villes et des blocs d’habitations.
« Gaza : comment maintenir la paix ? » (L'Essentiel du Dessous des Cartes, Arte)
Tandis que les Américains tentent de convaincre Israël que le fragile cessez-le-feu à Gaza doit tenir, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a annoncé les premières discussions à l’ONU pour créer une force internationale de stabilisation de 40 000 hommes, prévue par le plan Trump et censée remplacer le Hamas. Mais des casques bleus pour maintenir la paix à Gaza, est-ce possible ?
Sources
« Ce que le plan de Donald Trump pour Gaza passe sous silence en dit beaucoup plus que ce qu’il propose » (Le Monde).
Si on ne peut que saluer la tentative de trouver une issue à la guerre entre Israël et le Hamas, le plan présenté par D.Trump omet de nombreux éléments déterminants pour l’avenir de la région et de ses peuples.
« Réponse du Hamas, retrait militaire israélien, gouvernance… Pourquoi le plan de paix de Donald Trump à Gaza reste fragile » (France-Info).
Le plan en 20 points, approuvé par le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou et salué par la communauté internationale, est suspendu à la réponse du Hamas.
« Pourquoi le plan de Trump pour Gaza est très difficile à accepter pour le Hamas » (HuffPost).
Le mouvement palestinien souhaite amender certains points du plan américain pour l’enclave.
« L’attaque d’Israël au Qatar, le tournant qui a conduit Trump à imposer son plan de paix » (Courrier international).
« Le plan Trump ou le jeu du mikado au Proche-Orient » (Le Temps). Au-delà des caractéristiques propres de Donald Trump, son plan semble vouloir renouer avec la logique des petits pas, qui laisse les questions de fond pour plus tard. Un jeu de mikado auquel il est difficile de croire après deux ans de massacres à Gaza.
« Sur ce document, Gaza n’est plus qu’une tache bleue anonyme, cernée par une zone de sécurité dessinée à coups de hachures hâtives. Un schéma bâclé pour un destin confisqué. Une fois de plus » (Linked-in). Pour le géographe-cartographe Ryan Ibrahim-Bacha, « cette carte, d’un amateurisme dont Donald Trump lui-même ne renierait pas la patte, est censée incarner le plan pour l’avenir de Gaza. Ces quelques traits de couleur tracés à la main presque aléatoirement rappellent immanquablement le tracé arbitraire des frontières par les puissances coloniales d’autrefois. En apparence anodin, cet amateurisme est pourtant révélateur : il symbolise le peu de considération portée à un territoire abandonné par les politiques les plus cyniques, ceux qui voudraient en gommer l’histoire, le patrimoine, et avant tout le peuple ».
« Guerre dans la bande de Gaza : le Hamas se dit prêt à libérer les otages dans le cadre du plan de paix de Donald Trump, sous réserve "que les conditions soient réunies sur le terrain" » (France-Info).
Il peut être intéressant de comparer le plan proposé par Trump avec le précédent Plan de paix américain de janvier 2020 qui avait déjà suscité des réactions (Wikipédia). Le contexte a cependant évolué depuis 2020 : ce nouveau plan de paix trouvera-t-il plus d'écho ?
« La paix de Trump n'aura pas lieu » (Le Grand Continent). Pour Hakim El Karoui, auteur de « Israël Palestine, une idée de paix » (éditions de l’Observatoire, 2025), le président américain vante son « art de la paix ». Cette diplomatie de l’Air Force One peut-elle préparer autre chose que la prochaine guerre ?
The Economist a publié un graphique sur les résultats des cessez-le-feu au Moyen Orient pour la période 1989 à 2020. L'analyse suggère un optimisme très relatif.
« À quelle fréquence les cessez-le-feu au Moyen-Orient fonctionnent-ils ? » (The Economist)
« Même si le fragile cessez-le-feu est maintenu, de nombreux Gazaouis n'ont plus de foyer où retourner » (Bloomberg Graphics).
La majorité des 2,2 millions d'habitants ont été déplacés à l'intérieur et beaucoup n'ont plus de foyer où retourner, même si le cessez-le-feu est maintenu. Les Palestiniens sont entassés dans des tentes au sud de la ville de Gaza. Même si Trump a obtenu des promesses de cessez-le-feu, sa transformation en paix à long terme dépend de nombreux défis - le plus immédiat étant de reloger et nourrir la population de Gaza, puis de convenir d'une gouvernance et de la manière de financer une reconstruction coûteuse - tandis que les menaces d'une reconstruction du Hamas pour raviver les combat ou d'un retour d'Israël au conflit persistent. Une analyse satellite montrant des bâtiments endommagés et des tentes révèle des centaines de Palestiniens déplacés qui ont érigé des abris le long de la côte de la bande de Gaza, après avoir été contraints de quitter des zones urbaines qui ont été détruites. La reconstruction qui, selon la Banque mondiale en février 2025 pourrait coûter 53 milliards de dollars, et un avenir meilleur pour Gaza sont encore loin.
« Israël-Palestine : la solution à deux États, impasse géographique » (Géographie en mouvement).
Alors que s'esquisse une paix fragile à Gaza, que penser de la "solution" à deux États ? Renaud Duterme reprend quelques arguments contre cette idée, incompatible avec la situation (géo)politique actuelle. Point de vue à discuter car, même si la solution à deux États ne semble guère envisageable au vu du rapport de force sur le terrain, elle reste un horizon pour les Palestiniens...
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Articles connexes
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